Dossier HCERES – récapitulatif et chronologie (avril 2021)

Ce rappel chronologique des événements ayant conduit à l’appel du CNU et de plusieurs sociétés savantes, dont l’AFEA, à suspendre la participation des enseignant.e.s -chercheur.e.s est nécessairement incomplet. L’objectif est de replacer ces appels dans leur contexte.

Le présent rappel articule donc deux questions interconnectées : d’une part, la nomination de Thierry Coulhon à la présidence du HCERES et ses déclarations et prises de position publiques sur sa volonté de soumettre l’évaluation des Unités de Recherche à des critères contestés ; d’autre part les dispositions de la LPR ayant conduit la CP-CNU et diverses sections à appeler à suspendre la participation des chercheurs et enseignants-chercheurs aux comités d’évaluation du HCERES pour protester contre les attaques portées aux instances représentatives.

Vous trouverez en téléchargement dans l’encadré ci-dessous les documents qui étaient cette chronologie.

Article Médiapart (27 juillet 2020)
Article Sauvons l’université (octobre 2020)
Article du Monde sur la nomination de T. Coulon (1er novembre 2020)
Article du Monde – portrait de T. Coulon (10 novembre 2020)
Appel de l’Assemblée des Directions de Laboratoires (18 décembre 2020)
Communiqué de la CP-CNU sur la qualification (11 janvier 2021)
Appel de la section CNU 22 (5 mars 2021)
Appel de la section CNU 19 (5 mars 2021)
Communiqué de la CP-CNU (25 mars 2021)
Motion de l’AFEA (2 avril 2021)
Dossier HCERES – récapitulatif et chronologie (avril 2021)

Le HCERES et sa direction 

Chronologie de la nomination de Thierry Coulhon à la présidence du HCERES

Septembre 2019, Thierry Coulhon, conseiller enseignement supérieur et recherche du président, Macron préconise de « donner à l’évaluation son plein impact, c’est-à-dire construire, ou plutôt reconstruire, le lien entre l’évaluation et l’allocation des moyens » (retour à la notation et articulation notation/dotation).

29 octobre 2019 : le mandat de Michel Cosnard, président du HCERES, arrive à son terme.

Décembre 2019 :  premier appel à candidatures. Plusieurs candidats sont entendus lors d’auditions informelles par la ministre Frédérique Vidal mais aussi par le conseiller Thierry Coulhon, lui-même candidat.

20 janvier 2020 : Pour protester contre ce conflit d’intérêt, le collectif RogueESR lance une candidature collective à la présidence du HCERES, qui sera rejetée par le ministère malgré les 5400 signatures de soutien.

Début mars 2019 : La ministre Frédérique Vidal est contrainte de saisir le collège de déontologie du Ministère de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche.

29 mai 2020 : Avis du collège de déontologie : « L’éventuelle nomination à la tête d’une autorité administrative indépendante d’une personne qui exerçait immédiatement auparavant des responsabilités auprès des autorités du pouvoir exécutif est également de nature à susciter des hésitations. » Le processus de nomination déraille une première fois.

Juin 2020 : second appel à candidatures. 160 candidatures sont déposées, la plupart à nouveau à l’initiative du collectif RogueESR. Thierry Coulhon se porte à nouveau candidat. En une semaine, 4 candidatures sont sélectionnées, dont la sienne.

28 juillet 2020 : Thierry Coulhon, toujours conseiller du président, est auditionné avec les trois autres candidats par une commission d’examen présidée par la Secrétaire générale du Gouvernement et composée de quatre personnalités ès-qualités, dont une présidente d’université et un directeur général d’organisme de recherche. Ces derniers sont soumis à l’autorité directe du HCERES en matière d’évaluation, ainsi qu’à l’autorité indirecte du conseiller élyséen et candidat Thierry Coulhon.

2 octobre 2020 : communiqué de l’Élysée officialisant le choix d’Emmanuel Macron de proposer son conseiller Thierry Coulhon à la tête du HCERES.

30 octobre 2020 : Thierry Coulhon nommé président du HCERES (40 parlementaires contre, 34 pour, mais les « non » n’atteignent pas les 3/5e).

1er mars 2021 : Bernard Larrouturou, DGRI au MESRI d’août 2018 à novembre 2020, est nommé « directeur du département d’évaluation des organismes de recherche » du HCERES.

15 mars 2021 : Thierry Coulhon est nommé membre du collège de déontologie du MESRI.

LPR et appels à suspendre les participations aux évaluations HCERES

Vote de la LPR

LOI n° 2020-1674 du 24 décembre 2020 de programmation de la recherche pour les années 2021 à 2030, https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000042738027

Votée par le parlement malgré les avis défavorables de nombreuses instances représentatives et les critiques de la communauté scientifique.

Le code de l’éducation est ainsi modifié, introduisant une dispense de qualification pour les MCF HDR souhaitant candidater à des postes de PR : 

Article 5

1° Au premier alinéa de l’article L. 952-6, après le mot : « particuliers », sont insérés les mots : « , et sauf lorsque le candidat est maître de conférences titulaire ».

14 décembre 2020 : communiqué de la CP-CNU :

(extrait) « En signe de protestation contre la LPR et les conditions dans lesquelles elle a été adoptée, la quasi-totalité des sections du CNU ont décidé de suspendre leurs activités jusqu’à nouvel ordre. Dans ce contexte, la CP-CNU appelle l’ensemble des enseignantes-chercheuses et enseignants-chercheurs à ne pas siéger dans les instances d’évaluation et à refuser de participer aux comités de visite du HCERES. »

18 décembre 2020 : Appel de l’Assemblée des Directions de Laboratoires (également disponible en pdf dans l’encadré ci-dessus)

(extrait) « L’ADL invite tous les membres de la communauté de l’enseignement supérieur et de la recherche à ne plus participer aux procédures d’expertise demandées par le HCERES. »

Raisons exposées par l’ADL :

  • Mise en cause de l’indépendance du HCERES : Le HCERES, en tant qu’autorité administrative indépendante, ne doit pas être lié au pouvoir exécutif (le Président du HCERES Thierry Coulhon a dirigé le volant ESR de la campagne du candidat Macron)
  • Logique de mise en concurrence des Unités de Recherche : Retour annoncé du classement des structures de recherche pour permettre la révision des dotations de crédits récurrents, à l’aide d’indicateurs internationalement critiqués. La volonté de promouvoir des évaluations « différenciantes » répond à une logique de rentabilité et de compétition.
  • Passage d’une évaluation par visites d’experts à des critères « scientométriques » (données quantitatives).

11 janvier 2021 : communiqué de la CP-CNU sur la suppression brutale de la qualification pour les McF titulaires ayant soutenu une HDR (voir le dossier sur le site de la SAES). La CPU-CNU indique notamment que :

« S’il était clair, depuis l’adoption de la loi, que sa promulgation aurait pour conséquence de rendre caduque la procédure de qualification des MCF titulaires, le bureau de la CP-CNU dénonce une fois encore la méthode et le peu de considération de la direction de la DGRH à l’égard des candidat·e·s dont les dossiers ont été retirés du site [Galaxie pour la procédure de qualification]» et demande uneconcertation sur le processus de recrutement et prise en compte du cadrage national.

Appel du 5 mars de la section 22 du CNU (également disponible en pdf dans l’encadré ci-dessus)

Appel au respect du rôle et de l’indépendance du CNU :

(extrait) « Nous exigeons que le Conseil national des universités soit replacé au centre des processus d’évaluation individuelle et collective de la recherche universitaire, dans le respect de son indépendance. »


11 mars 2021 : Appel de la section 19 (également disponible en pdf dans l’encadré ci-dessus) : la section 19 du CNU (Sociologie) rejoint l’appel du 6 mars lancé par la section 22 (Histoire et Civilisations) qui dénonce diverses entreprises de casse et de précarisation du service public, relevant notamment :

« La destruction méthodique du service public d’enseignement et de recherche par la suppression du cadrage national de l’accès aux fonctions d’enseignement et de recherche, par le recul de la collégialité au bénéfice de procédures de nomination opaques dont les récentes réorganisations du HCERES rendent compte », et demandant à ce que le CNU soit replacé au contre des processus d’évaluation de la recherche universitaire (reprise du texte de l’appel du 5 mars de la section 22)

25 Mars 2021 nouveau communiqué de la CP-CNU (également disponible en pdf dans l’encadré ci-dessus) :

Communiqué du bureau de la CP-CNU sur les comités de visite HCERES, qui invite les membres du CNU et les enseignants-chercheurs en général à refuser de siéger dans les comités d’évaluation tant qu’une concertation sur l’article 5 de la LPR n’aura pas eu lieu.

Conclusion du communiqué :

« Sans garantie sur le contenu des décrets d’application de la loi promulguée fin 2020, la CP-CNU réitère donc son appel aux membres des sections CNU et à l’ensemble des enseignants-chercheurs sollicités pour les comités de visite HCERES à décliner cette invitation, dans l’attente de l’issue de la concertation »

2 avril 2021 : Motion du bureau de l’AFEA en soutien au communiqué de la CP-CNU du 25 mars (également disponible en pdf dans l’encadré ci-dessus) :

« Le bureau de l’AFEA a voté ce vendredi 2 avril 2021 son soutien au communiqué du bureau de la CP-CNU du 25 mars 2021 appelant à ne pas participer aux comités de visite HCERES »