le vendredi 18 novembre 2016 Université Sorbonne Nouvelle Institut du Monde Anglophone Cartographie de l’avortement, de la contraception et du pouvoir aux États-Unis depuis les années 1960

le vendredi 18 novembre 2016

Université Sorbonne Nouvelle

Institut du Monde Anglophone

(salle 16)

 

Cartographie de l’avortement, de la contraception et du pouvoir aux États-Unis depuis les années 1960

  

Lorsque, dans les années 1910, Margaret Sanger fonda le mouvement américain pour le planning familial afin de promouvoir un plus large accès à  la contraception, elle mit en évidence le problème posé par l’accès inégal à  l’information qui rendait la prévention d’une grossesse plus facile pour « les femmes des classes moyennes supérieures » (Sanger 1914) que pour leurs homologues plus modestes. En utilisant le terme de « Birth Control » plutôt que celui de « contraception », elle souhaitait souligner que, pour les femmes, la maitrise de leur fécondité était un prérequis indispensable à  toute participation à la vie sociale (Chesler 2007). Cent ans plus tard, le prisme des inégalités sociales et ethno-raciales semble toujours très pertinent lorsqu’il s’agit d’évaluer l’accès à  l’information sur la contraception et celui aux services relatifs à la procréation.

Les disparités géographiques semblent aussi jouer un rôle majeur. En effet, lorsque la Cour suprême décréta que l’avortement était un droit protégé par la Constitution dans l’ârrêt Roe v. Wade de 1973, elle établit également que les États fédérés avaient le droit d’en moduler l’accès. En 1992, dans l’arrêt Casey, celle-ci attribua un pouvoir élargi aux États qui furent alors en mesure de réguler l’accès à l’avortement, tant que les restrictions ne représentaient pas un obstacle excessif (« undue burden ») à la jouissance du droit constitutionnel des femmes à faire un choix personnel sur ces questions. Le concept juridique d’« undue burden » étant très vague, il a été utilisé par des lobbies anti-avortement, notamment Americans United For Life, pour promouvoir des lois limitant l’accès à  l’avortement dans chaque État. Aujourd’hui, alors qu’un État comme le Nouveau Mexique ne possède aucune restriction significative du droit à  l’avortement, l’État voisin du Texas a mis en place ces dernières années une série de lois contraignantes, créant une toute autre réalité : plus de la moitié de ses cliniques du planning familial ont disparu et elles sont sommées d’exiger par exemple de leurs patientes qu’elles subissent une échographie obligatoire.

Les cours d’éducation sexuelle varient aussi grandement sur l’ensemble du territoire américain : si certains États n’exigent pas que le sujet soit abordé à l’école, ceux qui le font ne demandent pas nécessairement que son contenu soit médicalement exact ou qu’il aborde les questions de contraception. Les conséquences de ces différentes politiques éducatives peuvent s’observer dans les taux variables de grossesse chez les adolescentes : ils sont par exemple quatre fois plus élevés dans l’Arkansas, État restrictif en termes d’éducation sexuelle, que dans le Massachusetts.

Les expériences des femmes variant en fonction de leurs identités complexes et multiples (Crenshaw), les inégalités sociales, genrées et géographiques se combinent aussi à d’autres éléments tels que l’identité ethno-raciale, le niveau d’études ou les croyances religieuses, qui permettent d’expliquer les  différences d’accès à l’avortement

A l’occasion de cette journée d’étude,  nous souhaitons envisager une cartographie de l’avortement et de la contraception au moyen d’une analyse de la géographie sociale et politique des année1960 – quand le combat féministe demandait et obtenait un meilleurs accès à  l’avortement et à  la contraception – à  nos jours. Nous souhaitons mettre en lumière le fait que les femmes ont des expériences radicalement différentes en matière d’accès à  l’avortement et à  la contraception du fait de leur appartenance, raciale, ethnique, sociale, comme de leur âge, leur niveau d’éducation, leurs croyances religieuses et autres identités sociales. Nous aimerions offrir une topographie sociale qui prenne en compte les rapports de domination afin de contribuer aux débats récents en France et aux États-Unis sur les utilisations sociales de la géographie (Séchet et Veschambre).

 

Les points suivants seront abordés :

 -La géographie politique et physique de l’avortement et de la contraception : comment les villes, les États et les régions ont construit l’accès à l’avortement et la contraception aux États-Unis.

 -L’espace comme production sociale. Il s’agira d’examiner la géographie sociale de l’avortement et de la contraception en analysant les droits et les modalités d’accès à  l’avortement et à la contraception  de toutes les femmes, quelles que soient leurs origines sociale, résidentielle et ethno-raciale ou encore leur âge.

 -La grande variété de points de vue sur les lois régissant l’avortement et la contraception de la part de femmes elles-mêmes, mais également des juristes, des militants et des professionnels de la santé, et ce depuis les années 1960.

 -L’examen de la prise en charge des femmes en matière d’avortement et de contraception et son évolution depuis les années 1960 en fonction des patientes, du statut du personnel de santé et des restrictions législatives au niveau de chaque État.

 

 Merci d’envoyer votre proposition (300 mot environ) aux organisatrices, accompagnée d’un court CV, avant le 15 septembre 2016 à l’adresse suivante: mappingabco@gmail.com

Mapping the Landscapes of Abortion, Birth Control, and Power since the 1960s

 Doctoral Symposium

Sorbonne Nouvelle-Paris 3

Friday November 18, 2016

 

When Margaret Sanger, founder of the American Birth Control movement, started advocating for wider access to contraception, she underlined the uneven distribution of knowledge, which made it easier for the “woman of the upper middle classes” than her poorer counterparts to prevent conception (Sanger 14). By using the term “Birth Control” rather than “contraception,” she stressed that the ability to make childbearing decisions was a necessary prerequisite to full participation in social life. A hundred years later, the framework of social inequality still seems particularly relevant when analyzing women’s access to reproductive information and services.

Geography also appears to be a determining factor. Indeed, when it ruled that banning abortion was unconstitutional in the 1973 Roe decision, the Supreme Court established abortion as both a woman’s and a state’s rights issue. In the 1992 Casey decision, it gave even more power to states to regulate access to abortion as long as the restrictions did not place “undue burden” on a woman’s constitutional right to choose. The legal concept of “undue burden” being open to interpretation, it has been used by anti-abortion groups like Americans United For Life in order to promote state legislation limiting access to abortion services. Today, a state like New Mexico does not have any major abortion restrictions, while in neighboring Texas a string of abortion laws passed in recent years have created a very different reality: over half of the facilities providing abortion care have disappeared and women are required, among other things, to undergo mandatory ultrasounds.

Sex education also varies greatly across the nation: while some states do not mandate it be taught in school, not all of those who do require it do not stipulate its contents must be medically accurate or even that they include contraception. The results of very different policies can be seen in the teen pregnancy rates, which is for instance four times higher in the state of Arkansas than in the state of Massachusetts.

As women’s experiences vary with their complex and multifaceted identities (Crenshaw), social and geographical inequalities often combine with other factors such as race, education, and religion to explain differences in access.

In this symposium, we would like to look at the landscapes of birth control and abortion rights through the prism of both social and physical geography from the 1960s to the present. We would like to focus on the fact that women have profoundly different experiences of contraception and abortion access due to their race, ethnicity, class, age, education, religion and other social identities. We hope to develop social landscapes that deal with the dialectics of submission and domination in order to contribute to the contemporary discussion dealing with geography’s social applications and effects (Séchet and Veschambre).

 

 Suggestions for inquiry:

 – The physical geography of abortion and birth control: how cities, states and regions have shaped women’s access to abortion and birth control.

– The social geography of abortion and birth control: questions dealing with all women’s right of access, allowing us to visualize who and how as well as when one is able to seek out abortion or contraceptive services.

-The multitudinous perspectives on birth control and abortion laws by women, laymen, lawyers, and doctors.

– Presentations of the different profiles of those who have performed abortions over time, painting a portrait of the quality of care women have received and how this has varied depending on the statuses of the provider, the patient as well as the legal parameters put in place by a specific state.

Abstracts of approximately 300 words and a short CV should be sent to the organizers before September 15, 2016 at the following address: mappingabco@gmail.com

 

Selected Bibliography

Chesler, Ellen. Woman of Valor: Margaret Sanger and the Birth Control Movement. New York: Simon & Shuster, 2007.

Crenshaw, Kimberlé. “Demarginalizing the Intersection of Race and Sex: A Black Feminist Critique of Antidiscrimination Doctrine, Feminist theory and Antiracist politics.” University of Chicago Legal Forum (PhilPapers) 139 (1989): 139-167.

Fassin, Eric. « L’avortement aux États-Unis. Histoire d’une politisation, des origins à Roe v. Wade ». Les Etudes du Ceri 22 (Jan. 1997): 2-42.

Garrow, David. Liberty and Sexuality: The Right to Privacy and the Making of Roe v. Wade. New York: Open Road, 2015.

Joffe, Carole. Doctors of Conscience: The Struggle to Provide Abortion Before and After Roe V. Wade. Boston: Beacon Press, 1995.

Joffe, Carole and Diane di Mauro. “The Religious Right and the Reshaping of Sexual Policy: An

Examination of Reproductive Rights and Sexuality Education,” Sexuality Research & Social Policy (Journal of NSRC), March 2007.

Luker, Kristin.  Abortion and the Politics of Motherhood. Berkley: University of California Press, 1984.

Nelson, Jennifer. Women of Color and the Reproductive Rights Movement. New York: New York University Press, 2003.

Reagan, Leslie. When Abortion was a Crime : Women, Medicine and Law in the United States, 1867-1973. Berkeley: University of California Press, 1997.

Sanger, Margaret. “The Prevention of Conception.” The Woman Rebel, March 1914.

            The Autobiography of Margaret SangerNew York: Dover Publications, 2004 [1938].

Séchet, Raymonde and Vincent Veschambre, dir. Penser et faire la géographie sociale. Rennes: PU de Rennes, 2006.

 

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