Le Livre blanc de l’enseignement supérieur et de la recherche a été remis le 31 janvier 2017 à Thierry Mandon

Le Livre blanc de l’enseignement supérieur et de la recherche a été remis le 31 janvier 2017 à Thierry Mandon.
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Je vous propose ci-dessous quelques extraits (j’ai mis des mots clés en caractères gras pour faciliter la lecture):

“L’évolution très rapide des compétences requises rend impérative l’élévation du niveau de qualification, la formation des individus tout au long de la vie et la flexibilité des parcours. Les modalités de formation se diversifient avec l’appui des technologies numériques. Du fait de cette évolution, on constate au niveau mondial une explosion de la demande de formation de niveau supérieur. Les dépenses d’enseignement supérieur ont ainsi augmenté de 30% au niveau mondial entre 2005 et 2013.” (p 12)

“Du point de vue budgétaire, les dépenses d’Enseignement supérieur comme celles de Recherche constituent un véritable investissement.” (p 12)

“Des moyens sont également prévus pour améliorer l’attractivité des carrières et favoriser les jeunes chercheurs. L’entrée dans la carrière est aujourd’hui peu attractive avec un ratio de
1,7 fois le SMIC et des moyens de recherche limités. Aussi les carrières seront-elles améliorées grâce aux mesures du protocole PPCR (Parcours Professionnel, Carrières et Rémunérations).

Elles conduisent à une amélioration des carrières pour les maîtres de conférences, chargés de recherche, personnels administratifs et techniques… Au total 820 M€ sur 4 ans seront engagés sur les différentes mesures annoncées.” (p 20)

“Les comparaisons internationales montrent la faiblesse des rémunérations, particulièrement pour le début de carrière : les salaires sont 2,5 fois plus élevés en Allemagne qu’en France, en début de carrière, alors qu’en fin de carrière le ratio n’est plus « que » de 1,5.” (p 150) c.f. tableau p 151, la France est au 18ème rang mondial).

“les outils numériques invitent à repenser la question de l’accès physique à l’enseignement supérieur dans la mesure où la connaissance devient accessible de manière déterritorialisée, ce qui renforce la nécessité de constituer des campus visibles à l’international et ouverts en ligne sur le monde entier.” (p 32)

“Laisser échapper des données est un manque à gagner stratégique pour l’Université : L’Université laisse s’échapper le potentiel de progrès porté par l’analyse des données éducatives vers d’autres acteurs (ex : LinkedIn propose des services d’évaluation, de l’extérieur, de la qualité de vie dans les universités, de la valeur des cursus ans les carrières, de proposition de parcours ajustés). C’est pourtant l’évolution de l’offre de formation universitaire, ainsi que de la captation de réseaux d’alumni, dont elle se prive, qui pourraient être au fondement d’un nouveau modèle de croissance de l’Université. (…) Grâce au numérique, les institutions universitaires peuvent personnaliser l’apprentissage et accompagner l’étudiant dans la définition de son parcours académique et dans son travail personnel. Par exemple, les Learning Analytics et l’Adaptive Learning en exploitant les traces digitales produites lors des interactions d’apprentissage permettent de mieux comprendre les modes d’apprentissage de chacun, d’apporter un suivi individuel des étudiants.” (p 33)

“l’idée même de stratégie suscite souvent la méfiance. La tentation peut être grande pour un pouvoir politique d’essayer de rentabiliser au mieux son effort budgétaire, en pré-définissant ce qui lui semble digne d’intérêt et ce qui ne l’est pas, et en fléchant tous ses financements sur la première catégorie. Ce n’est pas le choix de la France. La stratégie nationale doit donc prendre explicitement en compte le fait que la recherche non-programmée, en particulier fondamentale, doit être fortement soutenue, et que le financement de l’activité scientifique dans le cadre des axes thématiques de la stratégie nationale ne peut être que limité à une partie du financement total.” (p 50)

“Un équilibre doit être trouvé entre les deux grandes modalités de financement de la recherche, par le biais des crédits de base des laboratoires d’une part, par les crédits sur projets d’autre part.” (p 117)

“L’éducation, sous tous ses angles, est un sujet de recherche trop peu investi, et l’est surtout de manière éclatée. L’enjeu est de taille, le champ mérite d’être investi de façon pluridisciplinaire et structuré par la constitution de réseaux solides. Compréhension des processus cognitifs, développement de nouveaux lieux et formes d’apprentissage, développement d’outils, formation des formateurs dans le cadre de recherche-action… La SNR prévoit dans l’orientation 33 d’appuyer les travaux de recherche concernant l’éducation, au service du développement de l’innovation pédagogique en particulier. La StraNES les intègre dans son chapitre « Investir sur la formation du xxie siècle»” (p 63)

“Les SHS sont aux avant-postes de la réflexion pour se saisir des phénomènes politiques, religieux, économiques, culturels et sociaux. Elles nous proposent des clés pour l’intelligibilité du monde. Les résultats de la recherche en SHS devraient soutenir et éclairer les dynamiques citoyennes, les projets des entreprises et bien évidemment l’action publique. C’est le sens du plan sciences humaines et sociales lancé par le MENESR en juillet 2016. Premier dans son genre, celui-ci vise à soutenir à la fois : le développement de la recherche en sciences humaines et sociales, notamment dans sa dimension interdisciplinaire : + d’argent (hausse de 50 % en 2017 des projets SHS financés par l’ANR) ; + de facilité (portails rassemblant les appels d’offres en SHS, y compris internationaux) ; l’insertion professionnelle des diplômés en SHS, et notamment des docteurs : constitution d’un annuaire numérique des docteurs avec des services associés, campagne de communication sur les docteurs créateurs d’entreprise ou en start up, appel à manifestation d’intérêt lancé en 2016 pour des dispositifs d’insertion innovants des diplômés SHS… ” (p 82)

[commentaire personnel: la recherche n’est envisagée que strictement dans sa dimension “sciences dures” dans tout le Livre blanc, les SHS sont réduites aux sciences économiques et  politiques et à la sociologie].

“On constate un redémarrage de l’élévation du niveau de qualification, avec un accroissement du nombre d’étudiants qui est actuellement supérieur aux projections effectuées il y a plusieurs années. Ainsi, en 2011 les projections effectuées par les services statistiques donnaient une perspective de 2 458 000 étudiants en 2015, alors que le chiffre constaté en 2015 est de 2 551 000, soit 100 000 étudiants de plus que prévu.” (p 96) 20% seulement des bacheliers entrant dans l’enseignement supérieur en formation initiale en sont sortis sans diplôme, contre 32% en moyenne dans l’OCDE : la France est un des pays les plus performants de ce point de vue. (p 40)

“Les pratiques pédagogiques innovantes sont mieux valorisées. C’est le cas dans le cadre du processus de contractualisation et d’accréditation, qui intègre l’évaluation par le HCERES, où l’attention sera portée sur le développement de la formation des personnels. Afin de permettre à des enseignants de se ressourcer pédagogiquement, et en particulier d’offrir la possibilité d’une immersion dans une université étrangère reconnue pour son dynamisme et ses actions en faveur de la transformation des pratiques pédagogiques, le Congé pour Recherche et Conversion Thématique va évoluer pour intégrer aussi la possibilité de consacrer un ou deux semestres entièrement à l’innovation pédagogique.” p 101)

“le statut d’agrégé a été modifié afin d’ouvrir une voie d’accès aux docteurs par un concours spécifique pouvant atteindre 15 % des places. Le rôle des docteurs-agrégés est d’apporter et de diffuser cette culture de la recherche dans l’enseignement secondaire.” (p 106)

“La lutte contre le phénomène du « plafond de verre », qui se traduit par un pourcentage de plus en plus faible de femmes à mesure que l’on gravit les échelons de la carrière, passe aussi par l’intégration de la dimension de genre dans la stratégie européenne de ressources humaines pour la recherche. Au niveau national, chaque établissement devra se doter et publier au cours de l’année 2017 son bilan de situations comparées entre les femmes et les hommes. La question du genre est désormais intégrée dans le dialogue contractuel avec les établissements.” (p 108)

“Pour ce qui concerne l’enseignement supérieur, aucun objectif n’a été adopté à ce jour en Europe. Il serait important que désormais l’Europe se dote également d’un objectif ambitieux dans ce domaine. Le rapport StraNES a proposé un objectif de 2 % de son PIB consacré à l’enseignement supérieur. Cet objectif, qui est un peu supérieur au taux observé dans les pays du Nord de l’Europe (1,8 %), mais inférieur à celui de pays comme les Etats-Unis ou le Canada (plus de 2,5 %), conduirait à une augmentation de 11 milliards d’euros en 10 ans, toutes sources de financement confondues” (p 143)

“Le gouvernement a fait le choix de ne pas augmenter les droits d’inscription à l’université, une position en phase avec ce qui se passe dans de nombreux pays européens, en particulier l’Allemagne (qui a supprimé les droits d’inscription) et les pays du Nord de l’Europe. Une augmentation des droits d’inscription conduirait à une large remise en cause du modèle
social de notre pays et serait contraire aux objectifs de la StraNES3. (p 143)

“Au niveau des doctorants, une augmentation de la rémunération du contrat doctoral a eu lieu en 2016 : elle est passée de 1 684 € brut à 1 748 € brut. Une nouvelle augmentation devra être mise en place afin de maintenir le rapport entre le contrat doctoral et le SMIC. Une augmentation mensuelle de 60 € coûtera environ 15 M€. Le nombre de contrats doctoraux doit également être augmenté, afin d’une part de réduire la part des doctorants non-financés, d’autre part d’accompagner le développement du doctorat.  1 000 contrats doctoraux supplémentaires représenteront une dépense de 30 M€” (p 152)

“Au niveau national, l’Institut Universitaire de France (IUF) occupe également une place importante permettant de renforcer l’attractivité de notre pays. Toutefois le nombre d’enseignants-chercheurs membres de l’IUF est insuffisant : il y a eu 105 nouveaux membres et 5 reconductions en 2016. Afin de le tripler d’ici à 2020, un budget de 30 M€ est nécessaire.” (p 152)

“Par ailleurs, le dispositif des Congés pour Recherche et Conversion Thématique (qui évolue pour permettre également le ressourcement pédagogique), ou des délégations d’enseignants-chercheurs dans les organismes de recherche, permet à des enseignants-chercheurs de s’investir dans leur activité de recherche (ou désormais dans une mission d’innovation pédagogique) pendant une période d’un ou deux semestres en général. Le nombre de semestres de CRCT attribués en 2016 n’est que de 900. Une augmentation importante est nécessaire et sera également un facteur d’attractivité, ce dispositif existant de manière plus importante dans de nombreux pays. Une ligne de 20 M€ sera dédiée à la montée en puissance de ce dispositif, afin de financer 4000 semestres supplémentaires par an. Ces semestres permettront également de favoriser le ressourcement pédagogique.” (p 152)

“Nous vivons actuellement une période de faibles départs en retraite, sous le double effet du creux dans les recrutements dans les années 70 et du recul de l’âge de départ en retraite, effets auquel s’ajoute le gel d’emplois dans de nombreux établissements. (…) Pour les EPSCP, un plan de 1 000 recrutements par an est encore nécessaire.3 (pp 153-154)

“La pyramide des âges actuelle, marquée par la faiblesse de recrutement des années 70, induit un GVT important : 60 M€ par an. La compensation de ce GVT est nécessaire pour éviter d’annuler les mesures concernant les recrutements.” (p 154)
Pour compléter, un article du Monde: (lien ici): “Le livre blanc pour l’université et la recherche préconise d’investir 10 milliards d’euros en dix ans. Un tel investissement permettrait une croissance de dix points du PIB et la protection de 400 000 emplois face au risque de chômage et d’inactivité, selon cette feuille de route portée par le gouvernement.”
Jean Albrespit
Chargé de la veille documentaire
Bureau de la SAES


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