Consultation HDR

Message de Paul Volsik, président de la commission de la recherche SAES (26 mai 2005)

Lors de sa réunion du 13 mai 2005, le bureau de la SAES a décidé de relancer la réflexion sur les modalités de fonctionnement de l’HDR dans une perspective d’harmonisation et de clarification. Le bureau a proposé à l’Assemblée Générale le calendrier suivant : – Une consultation électronique des membres jusqu’au 1er janvier 2006 – Un examen des propositions des membres lors d’une réunion du bureau mi janvier et (si des pistes se dégagent) – Une réunion de la commission de la recherche au printemps 2006 – La discussion et vote (éventuels) d’un texte modifié lors de l’Assemblée Générale du congrès de Nantes. Le bureau serait donc heureux de connaître le point de vue des membres (et notamment des candidats et des responsables scientifiques) sur des questions comme la définition de la nature exacte du mémoire de synthèse, la notion d’ouvrage « publié ou publiable » etc.

Pour faire connaître votre point de vue, vous devez l’adresser par courrier électronique à l’adresse :
hdr@saesfrance.org
Les messages seront rassemblés sur le site SAES (www.saesfrance.org) à la rubrique “Profession / Consultation HDR”.
Avec mes salutations les plus cordiales,

Paul VOLSIK (Vice-Président, chargé de la recherche)
PS Le texte “HDR : Recommendations SAES/AFEA 2004” se trouve à la rubrique “Profession / Consultation HDR”.

Messages des adhérents :

From : “Susanne Berthier”
To : hdr@saesfrance.org

Subject : HDR
Date : Fri, 27 May 2005 15:52:21 +0200
Bonjour,
Je suis candidate à une HDR et, depuis plusieurs années, je lis avec attention les recommandations publiées à ce sujet. J’ai apprécié la clarté des recommandations SAES/AFEA 2004. Toutes les précisions, en particulier sur le mémoire de synthèse, seront les bienvenues.
Cordialement,
Susanne Berthier-Foglar
Responsable du Département d’Anglais Appliqué
UFR de Langues Université Stendhal – Grenoble 3
B.P. 25 38040 Grenoble cedex 9

03/10/05
Heather HILTON

Département de LEA, Université de Savoie
73011 Chambéry FRANCE
tél : (33 ou 0) 479.75.85.22
hilton@univ-savoie.fr

Bonjour, et merci d’offrir ce forum pour la discussion de nos critères d’avancement professionnel.
Je suis maître de conférences dans une “petite” université depuis 1990, et je tente — avec beacoup de difficulté — d’avancer dans ma carrière, et donc dans la recherche. Après les lourdes charges d’enseignement et de travail administratif que j’assume depuis ma nomination il y a 15 ans, il ne reste que très peu de temps à consacrer à des projets de recherche sérieux, bien menés, minutieux (mes recherches sont dans le domaine de l’acquisition/ la didactique des langues, et je tiens à y appliquer une méthodologie scientifique des plus rigoureuses).

Je trouve l’exigeance actuelle d’un dossier de 300 pages, plus un document de synthèse de 100 pages irréaliste (pour ne pas dire “downright discouraging !”) dans les conditions de travail actuelles des enseignants-chercheurs. Je suis tenace, ambitieuse, mais il y a des jours où je me dis que je n’y arriverai jamais. A l’époque de la thèse d’état (de 400-500 pages, d’après ce que j’ai compris — nous y revenons, donc, sous une autre forme), je pense que la situation des enseignants-chercheurs étaient différente… Je connais aussi d’heureux maîtres de conférences qui ont été habilités il y a quelques années, avec des dossiers de très bonne qualité, comportant nettement moins de pages de publications.

Je demanderais donc au bureau et à la SAES de débattre autour de l’utilité de telles quantités de publications. 200 pages au total me paraît tout à fait raisonnable pour apprécier le niveau scientifique d’un postulant à l’habilitation : 150 pages de publications (TOUTES dans des revues avec comité de lecture) plus 50 pages de synthèse des travaux (car ce document n’a aucune valeur scientifique en dehors de la France — c’est beaucoup demander aux candidats de générer 100 pages de rédaction scientifique “non-recyclables” !). Ces chiffres étant, bien sûr, un minimum pouvant être dépassé par ceux qui le veulent et le peuvent !

En vous souhaitant un débat fructueux, et en remerciant la SAES de son travail inlassable et indispensable pour les Anglicistes de France,
Très cordialement,
Heather HILTON

09/10/05
Pierre Dubois

U.F.R. d’anglais
Paris IV-Sorbonne
1, rue Victor Cousin
75005 – Paris
Pierre.Dubois@paris4.sorbonne.fr

Chers collègues,
L’an passé, la S.A.E.S. a présenté un certain nombre de propositions pour tâcher d’harmoniser les exigences des diverses universités pour l’Habilitation à Diriger des Recherches. Le but visé, tout à fait juste à mes yeux, est de faire en sorte qu’il y ait une réelle harmonisation entre les diverses universités, tout en laissant « le champ libre à des parcours divers » (voir Bulletin de la S.A.E.S. n° 71, juin 2004, pp.20-24). Seule une telle harmonisation peut en effet garantir que les H.D.R. délivrées soient d’une « valeur » comparable et qu’on ne demande pas trois fois plus (ou moins) de travaux dans telle université que dans telle autre. La démarche de la S.A.E.S. (et de l’A.F.E.A.) me semble donc tout à fait positive. Je ne suis pas certain en revanche de souscrire pleinement au détail des recommandations faites. Lors de la discussion des recommandations de la S.A.E.S. au cours du congrès de Saint-Quentin il y a deux ans, notre collègue Jeffrey Hopes (Université du Mans) avait exprimé un certain nombre de critiques à l’égard des modalités de l’H.D.R., notamment à propos du mémoire de synthèse. Bien que d’accord avec lui, je m’étais alors abstenu, estimant qu’il eût été quelque peu déplacé de me prononcer pour ou contre les propositions de la S.A.E.S. alors que je n’étais pas personnellement habilité. J’ai donc attendu d’avoir soutenu mon H.D.R. et d’être qualifié par le C.N.U. pour me permettre de revenir sur cette question. Je remercie la S.A.E.S. d’avoir lancé une consultation à ce sujet et en profite donc pour reproduire ici les remarques que j’avais adressées personnellement à nos collègues François Poirier et Paul Volsik à ce sujet après ma qualification. Comme on le verra, mes constatations rejoignent celles de notre collègue Heather Hilton sur le site de la S.A.E.S.

Au cours de l’année écoulée, j’ai eu plusieurs occasions de discuter avec d’autres collègues également en train de préparer leur Habilitation. Le sentiment qui semble dominer – du moins parmi tous ceux à qui j’ai pu en parler – est que les modalités de l’H.D.R. sont non seulement très lourdes (ce qui peut s’accepter car il s’agit bien de montrer des aptitudes scientifiques et une grande capacité de travail), mais aussi assez stériles. Le document de synthèse est un exercice qui peut être intéressant en soi mais qui, introspectif par définition puisqu’il consiste à mener une réflexion critique sur les propres travaux du candidat, restera nécessairement inutile pour la communauté des chercheurs une fois l’Habilitation soutenue. Comme le souligne Heather Hilton, ce document – qui exige beaucoup de temps et de travail – reste “inrecyclable” à l’extérieur de l’hexagone. Il est certes pertinent de porter un regard critique et synthétique sur son propre travail de recherche – encore qu’il me semble qu’un tel regard devrait faire partie, quasiment en permanence, de toute démarche de recherche sérieuse… – mais il est irréaliste de demander cette synthèse en plus d’un travail original.

Ce dernier, l’ouvrage « publié ou publiable », est plus pertinent en termes de recherche à proprement parler. Ce qui reste problématique à son sujet est que certaines universités exigent qu’il ne puisse s’agir d’un ouvrage publié, ce qui est pour le moins paradoxal puisque l’un de nos premiers soucis devrait justement être de diffuser le fruit de notre recherche le plus largement possible. Exiger du candidat à l’H.D.R. qu’il consacre tant de temps à la préparation d’un mémoire dont la portée est très limitée, à la remise en page fastidieuse de ses articles (alors que nous disposons de tirés-à-part en abondance…), à la compilation d’un dossier volumineux, précisément alors que, par définition, il est arrivé à un stade de sa carrière où il est impliqué dans de nombreuses activités universitaires et projets de recherche, ne semble pas raisonnable – sans même parler de la nécessité d’une soutenance généralement très longue où – rite de passage oblige – le candidat se trouve à nouveau « infantilisé » face à ses collègues du jury !

Qu’on ne se méprenne pas sur mes propos : je ne suis nullement favorable à ce que l’on « brade » l’H.D.R., au contraire. D’une certaine façon nostalgique de l’ancienne thèse d’État qui permettait un meilleur approfondissement de la recherche sur un même sujet que ne le permet la thèse dite “de nouveau régime” (on goûtera la polysémie croustillante de ce terme qui fait aussitôt penser à certaines cures d’amaigrissement), je comprendrais que l’on exige du candidat la présentation d’un travail majeur de synthèse dans son champ de recherche (et non pas simplement de synthèse critique de ses propres travaux), travail qui, lui, pourrait faire l’objet d’une publication “internationale”. À l’inverse, on pourrait envisager de n’exiger que le mémoire de synthèse, l’évaluation de la recherche du candidat se faisant à partir de son dossier de publications, et en n’exigeant alors qu’un seuil quantitatif et “de notoriété” plus élevé. Mais demander à la fois le document de synthèse et un ouvrage original semble inutilement lourd et contribue davantage à décourager les candidats ou à leur faire perdre beaucoup d’un temps qu’ils pourraient utiliser de façon plus productive autrement. J’avouerai franchement avoir eu du mal à me remettre à ma recherche après le marathon de la préparation et de la soutenance d’H.D.R., ce qui est pour le moins paradoxal !

Ne prétendant nullement avoir les réponses précises à apporter à cette question, je ne souhaite que contribuer par ces quelques éléments à la réflexion collective.
Très cordialement,
Pierre Dubois

10/10/05
Sylvie LE BARS

MCF, UFR Langues (Anglais) RENNES 2
UHB, Place du Recteur Henri LE MOAL
CS24307, 35043 RENNES CEDEX
sylvie.le-bars@wanadoo.fr

Je prends tardivement connaissance du débat sur le HDR et je voudrais ajouter ma pierre après avoir fait l’expérience du rejet de ma candidature par deux fois.
Les conseils fournis par notre collègue sont très précieux, et je voudrais l ’en remercier, car c’est un progrès par rapport à une période antérieure où les attentes étaient mal définies.
En ce qui concerne le dossier de synthèse, en particulier, la nécessité de présenter un ensemble cohérent, un projet clair et novateur qui s’inscrit dans un problématique déjà bien élaborée est absolument essentielle à faire passer. Il est également important de souligner qu’il faut bien se renseigner avant de se lancer dans une HDR, surtout dans un domaine mal défini comme la civilisation, où on est tour à tour anthropologue, historien, ethnologue, politiste, sociologue, géographe, voire au mieux amateur plus ou moins éclairé dans toutes ces disciplines.

Mais il faudrait précise régalement quelques autres points que l’ai appris à mes dépens. Le premier c’est que les profils atypiques, les changements d’ orientation sont apparemment pénalisants. Ainsi, il ne faut pas se retrouver en civilisation avec une thèse en littérature, ce qui est mon cas en raison de circonstances au départ quelque peu fortuites. Même si on se présente après plus de dix ans dans la nouvelle voie, cela gêne. De même, il faut éviter de donner le sentiment que l’on passe d’une thématique à une autre, même si on pense qu’il y a une cohérence interne dans ce qu’on fait (il faut être sûr de pouvoir le démontrer, le jour venu).

En outre il faut souligner qu’une implication trop grande dans la préparation aux concours est contre-productive, voire néfaste. Outre qu’elle réduit considérablement le temps que l’on peut consacrer aux communications et articles de « recherche », elle amène à publier des monographies qui n’ ont pas nécessairement de rapport direct avec le travail de recherche en cours et qui peuvent donner l’impression que l’on s’éparpille et que l’on écrit sur tout, sans être véritablement compétent (or ces monographies peuvent être le résultat de véritables recherches et devraient sans doute compter dans le corpus, et non être retirées de la masse de documents entrant dans le calcul du volume requis pour le HDR.). Et pourtant dans des universités de province, même de taille respectable, avec des départements d ’Anglais assez importants, on peut se retrouver à assurer les cours Capes-Agreg parfois très pointus (notamment à l’Agrégation) pendant une quinzaine d’années (avec participation au jury et rédaction des rapports) ce qui fut mon cas, au détriment de la recherche et par conséquent de la carrière. D’ailleurs les tâches administratives ne sont pas non plus valorisées, au contraire, pas plus que les formations dispensées aux enseignants du secondaire.

La nature des publications, ainsi que les supports sont des données capitales et il faudrait le souligner avec plus de force en donnant en outre des exemples précis de publications recevables ou non dans cette perspective précise. Ce qui est trop « pédagogique » peut n’être pas retenu. Un livre « publiable » accepté par une maison d’édition mais programmé pour plus tard, peut également être écarté, ce qui réduit d’autant le nombre de publications, or ce nombre a son importance.

Si l’on peut se réjouir et se féliciter de la clarification des critères et des modalités d’une épreuve mal définie jusque là, il faut néanmoins, me semble-t-il, encourager les chercheurs confirmés à se renseigner sur la pertinence de leurs choix de cours et de thèmes, et à s’assurer de la cohérence de tout ce qu’ils publient. Il est également impératif qu’ils soient attentifs à la nature de la publication qui acceptera leurs travaux et qui les diffusera. Ils doivent également privilégier les Congrès qui publient tous les travaux dans les « Actes » ou dans d’autres ouvrages collectifs afin de ne pas accumuler les communications jamais publiées. En ce qui me concerne, j’ai préféré renoncer une fois pour toutes, après deux tentatives infructueuses, et faire des communications, dans des Congrès mais aussi des conférences ou des animations dans les collèges, les lycées, les classes préparatoires ou l’IEP pour mon plaisir, et pour faire connaître et mieux comprendre la civilisation américaine, dans divers lieux,sans la pression du HDR.

Sylvie LE BARS, MCF, UFR Langues (Anglais) RENNES 2
(devenue) spécialiste de la question de la langue espagnole dans la construction identitaire des Chicanos / Latinos

Date : Mon, 10 Oct 2005 16:59:22 +0200
De : Riitta.Blum@unice.fr

Cher(e)s collègues,
J’aurais préféré plus d’affirmations positives que de phrases négatives. La plupart des propositions décrivant l’HDR disent “la synthèse n’est pas, ne doit pas être”…. Il n’y a pas assez d’affirmations “la synthèse doit être…” En principe, si la synthèse n’est pas une autre thèse qui présente un travail nouveau et original, qu’est-elle donc ?
Cordialement,
Riitta Blum

26 octobre 2006
Point de vue de E. Vernadakis (Université d’Angers)

Selon les recommandations actuelles il faudrait qu’il y ait une séparation nette entre le vécu du candidat et sa recherche. Cela, je présume, afin de préserver la nature scientifique du document de synthèse. Dans la pratique, j’ai trouvé difficile de ne pas faire intervenir mon expérience personnelle dans la justification des choix thématiques et, surtout, des positions idéologiques de mon parcours de recherche. J’ai apprécié le cadrage, mais n’ai voulu le suivre que jusqu’à une certaine mesure. Parce que je pense qu’un cadrage parfaitement scientifique d’un parcours littéraire (et je ne suis pas le seul angliciste à en avoir un) risque de déshumaniser une branche de nos savoirs qui reste encore humaine.

Un autre point que j’aimerais aborder concerne le travail de direction d’une revue. Les tâches éditoriales ne devraient-elles pas être reconnues comme partie intégrante du parcours de recherche ? À l’exception du petit mot publié dans le dernier volume du bulletin de notre Société je n’ai pas trouvé, dans les textes officiels de la SAES, des remarques spécifiques concernant cette activité. Est-ce qu’elle est prise en considération dans le dossier HDR ?

Enfin une remarque sur une question de présentation. Selon les recommandations, les articles qui accompagnent le mémoire d’HDR devraient être précédés de la couverture de l’ouvrage dans lequel ils figurent et suivis de la table des matières du dit ouvrage. Il est également précisé que les photocopies sont préférées à une ressaisie. La plupart des candidats qui, actuellement, présentent un dossier HDR appartiennent à une génération qui a toujours travaillé sur traitement de texte. Donc il ne s’agit pas de ressaisir l’article mas d’envoyer la version originale archivée. Quoi qu’il en soit, le mode de reproduction du document me semble indépendant de sa qualité. Un article est jugé par rapport à son contenu. Et dans la mesure où le contenu ne change pas selon les modes de reproduction, je ne comprends pas pourquoi il faudrait préférer les photocopiés. La table des matières permet, quant à elle, de connaître les autres auteurs qui ont participé à la publication ; elle, non plus, n’ajoute rien à la qualité, bonne ou mauvaise, de l’article. La présence d’un article d’un angliciste inconnu à côté d’un article d’un illustre chercheur ne garantit la qualité d’aucun des deux articles.

15/12/05
Point de vue de Pascale Guibert

Université de Caen
pguibert3@wanadoo.fr

Tout d’abord, je souhaite remercier très sincèrement les initiateurs de cette consultation sur les modalités de présentation d’un dossier d’HDR.
Pour ma part, j’ai effectivement trouvé dans ces recommandations dans le simple fait qu’elles soient là ‹ un encouragement. L’idée d’un document de synthèse permettant de / obligeant à prendre un recul honnête et conscient sur son propre travail me paraît indispensable à qui devra savoir critiquer attentivement et généreusement le travail des autres. Je trouve aussi l’idée du document de synthèse profondément stimulante : oui, bien sûr, nous devrions tous faire preuve, à chaque instant de nos journées de travail universitaire, d’un esprit
auto-critique sans complaisance, d’une cohérence théorique convaincante, d’une connaissance sérieuse et bienveillante des écrits critiques et théoriques anciens ou nouveaux touchant à nos domaines. Mais quelle communication de 20 ou 30 minutes, quel cours de L, quel échange avec quels collègues nous permet de prendre vraiment le temps d’aller à la rencontre de différents systèmes de pensée et de les mettre à l’épreuve de notre propre recherche ? Le document de synthèse ne nous engage-t-il pas, justement, à prendre ce temps ?
S’il est vrai qu’il n’est pas publiable, je pense qu’il n’est pas infructueux pour autant. Ce travail de réflexion théorique qui peut y être
mené peut avoir une action bénéfique sur notre enseignement, les étudiants, de tous niveaux, ayant, je crois, tout à gagner à comprendre comment leur enseignant fonctionne, pourquoi nous ne parlons pas tous de la même façon d’un (même ?) texte.

Si j’ai un regret à émettre concernant ces recommandations en vue de la préparation du dossier d’HDR, il est qu’à aucun moment (sauf pour les didacticiens) l’investissement pédagogique ne puisse ou ne doive apparaître dans ces documents qui visent, pourtant, à évaluer des
enseignants-chercheurs. Il me semble, pourtant, que ces deux activités se rejoignent dans une pratique à chaque instant nourrie de ses deux pôles. Ainsi, il me paraît toujours intéressant (c’est évidemment un euphémisme) de pouvoir comprendre comment telle « position méthodologique » s’applique tant à nos heures de recherche proprement dite qu’à nos heures d’enseignement. Un « parcours » de tentatives et pratiques pédagogiques relève-t-il simplement de la cuisine interne, de ce qu’il ne vaut mieux pas montrer pour on ne sait trop quelle raison ? Comment prendre en compte ce qui peut aussi constituer une énorme gageure chez beaucoup d’entre nous ?
Avec mes salutations respectueuses et tous mes v¦ux pour une très très bonne année.
Pascale GUIBERT Enseigne la poésie et la version à l’université de Caen

Message de J. Hopes

Professeur, Université du Maine – Le Mans
18/01/2006

La HDR est un diplôme qui remplit plusieurs fonctions : elle accorde le droit de diriger des thèses, mais, dans les faits, elle sanctionne aussi un haut niveau de recherche déjà accomplie et elle ouvre le chemin à une demande d’inscription sur la liste de qualification et donc à une candidature sur un poste de Professeur. Etant donné que c’est le CNU, lors de l’établissement de la liste de qualification, qui examine l’aptitude à exercer les (multiples) fonctions de Professeur, la HDR doit se cantonner strictement au domaine de la recherche. Elle ne doit pas se substituer à la liste de qualification ou au CNU. Pour être clair, aucun critère en dehors de la recherche ne doit être pris en compte dans l’attribution de la HDR.

Le document voté par la SAES concernant la recherche a établi des critères de classement des publications pouvant être utilisés lors de l’évaluation des dossiers HDR. Ces critères sont largement inspirés par le classement des travaux de recherche utilisé par le ministère lors de l’habilitation des équipes de recherche. Ce classement, on le sait, est celui des scientifiques, et pas toujours adapté à la réalité de la recherche dans notre discipline. Toutefois nous avons intérêt à l’adopter, tout en l’infléchissant, afin de crédibiliser notre recherche aux yeux du ministère (mais aussi du CNRS ou des instances européennes). J’approuve donc l’adoption de tels critères par la SAES, mais je regrette qu’il ne soient proposés qu’à titre consultatif. La raison de cette prudence bien compréhensible est qu’il n’existe pas un classement des revues scientifiques en langues, lettres et sciences humaines, comme il y en a en sciences ’dures’. Il me semble qu’à l’avenir, l’établissement d’un tel classement doit constituer un objectif majeur de notre communauté scientifique. Nous ne pouvons pas laisser perdurer une situation ou des publications qui ne sont jamais soumises à un comité de lecture ou à des lecteurs extérieurs soient mises sur le même niveau que celles qui adoptent les pratiques rigoureuses de la soumission des articles à des lecteurs anonymes par un comité de rédaction qu’adoptent les revues les plus reconnues.

Si on arrive à se donner des critères d’évaluation des publications beaucoup plus solides, l’examen des dossiers HDR sera largement facilité. Actuellement, et malgré les recommandations de la SAES, les pratiques des jurys sont encore très disparate. Voici quelques idées supplémentaires pour améliorer la lisibilité et la cohérences de cette pratique :

  • La nomination des jurys de HDR est formellement la responsabilité du Président de l’Université (à travers l’Ecole Doctorale) de l’Université d’inscription du candidat. Or, dans la plupart des cas, les jurys sont de facto ’assemblés’ par les directeurs de recherche en consultation avec le candidat lui-même. Les Ecoles Doctorales pourraient être plus attentives à cette question, mais dans le cas d’Ecoles Doctorales pluri-disciplinaires elles n’ont guère la compétence pour juger de la composition d’un jury en anglais. Je propose que ce soit au CNU de désigner les membres des jurys HDR. J’e n’ignore pas les obstacles juridiques à un tel changement. Dans le cas où il ne serait pas réalisable tout de suite, je proposerais que pour chaque dossier HDR, deux rapporteurs soient nommés par le CNU (qu’ils figurent ou pas dans le jury), et qu’on donne à ces rapports bien plus d’importance qu’aux pré-rapports actuels.
  • Pour que le CNU puisse nommer des jurys ou des rapporteurs, il faudrait qu’il dispose d’une liste exhaustive, et constamment mise à jour, des habilités à diriger des thèses. L’établissement d’une telle liste me paraît une nécessité même si le CNU n’intervient pas dans la composition des jurys. En effet, cette liste, qui doit à mon sens indiquer également le nombre et les titres des thèses déjà encadrées ou soutenues sous la direction des habilités, constituerait un annuaire précieux pour de futurs thésards, leur permettant de voir immédiatement qui pourrait encadrer leur travail.
  • Si nous arrivons à mieux évaluer les dossiers de candidature à la HDR grâce à de meilleurs critères d’évaluation des publications, il me semble que le mémoire n’aura plus d’utilité. Ce document est venu, au fil des années, à prendre une place prédominante dans le dossier. Surtout, et c’est là une véritable dérive qu’il convient de corriger au plus vite, il constitue, aux yeux de nombreuses Commissions de Spécialistes, le document clé lors d’une candidature à un poste de Professeur. Il est absurde qu’un document qui n’est pas destiné (en premier lieu) à la publication soit si souvent lue à la place des vraies publications du candidat. Les rapports de soutenance des HDR sont pour la plupart exempts des critiques et des éclaircissements qui font des (bons) rapports de thèse des documents très utiles lors d’un recrutement aux postes de MCF. Les CSE donc, et, je l’imagine, le CNU, se retournent donc vers le mémoire afin d’avoir une vue synthétique des travaux du candidat. Il serait bien plus satisfaisant que ces instances puissent disposer de deux rapports extérieurs détaillés et d’une garantie quant à la valeur scientifique des publications.

Je propose donc que si le nombre et la qualité des publications nécessaires à une candidature HDR sont définis de façon claire à partir des critères de classement des publications déjà établis par la SAES, et si des rapports écrits détaillés sont demandés par le CNU pour chaque candidat, le mémoire soit supprimé et remplacé par un propos liminaire court du candidat qui serait inclus avec le rapport de soutenance.

Dans la mesure où le nombre de candidats aux postes de Professeur augmente (et que le nombre de postes stagne), il me semble important de nous donner collectivement les moyens d’évaluer les candidats et d’indiquer aux candidats précisément ce qu’on attend d’un dossier HDR. C’est dans cet esprit de clarification et d’équité que je soumets ces quelques réflexions.


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