Ces dernières années, les artistes irlandais ont pris part, ou ont même été le fer de lance de campagnes en faveur du mariage pour tou.te.s (2015) ou pour le droit à l’avortement (2018) à travers des collectifs tels que l’Artist’s Campaign to Repeal the Eight. Le contexte du Brexit a donné lieu à des projets participatifs avec des communautés frontalières locales. En Irlande du Nord, la question des droits de l’homme est au cœur de la création artistique depuis le milieu des années 1990 et l’attribution de subventions européennes à des organismes internationaux comme le Special European Union Programmes Body (SEUPB) a entraîné une professionnalisation des arts et une augmentation des projets artistiques socialement engagés. A l’échelle européenne, l’implication des organisations artistiques dans des réseaux culturels tels que Trans Europe Halles (TEH) ou Caravan a contribué à ancrer les arts irlandais en Europe et à renforcer les partenariats qui impliquent les plasticiens engagés dans la défense des droits humains. Des programmes tels que Creative Europe ont permis à des collectifs d’artistes d’obtenir le financement de projets transnationaux qui impliquent des communautés par-delà les frontières nationales (« Corners of Europe », 2010 et 2016). Ces initiatives ont-elles eu un impact durable ? Quelles ont été les difficultés rencontrées dans la mise en œuvre des recommandations du Haut-Commissariat de la Commission des Nations Unies en vue d’ »augmenter les interactions sociales, la compréhension mutuelle et la confiance qui peuvent se faire jour, ou renaître à la faveur de ces initiatives » ?
Les projets collaboratifs contemporains, happenings et performances qui supposent l’interaction avec le spectateur se basent de plus en plus sur des lectures éthiques. L’ouvrage fondateur de N. Bourriaud, Relational Aesthetics (2002) a marqué un tournant dans les approches critiques de l’art en mettant l’accent sur l’aspect inter-humain des pratiques artistiques et en mettant l’accent sur la proximité comme moyen de résister à une société de plus en plus fragmentée. Plus récemment, Corine Pelluchon a appelé à mettre en œuvre un une “éthique de la considération” qui concilie théorie et pratique, raison et affect, dans le contexte d’une démocratie pluraliste et multiculturelle dotée de technologies extrêmement performantes. Cette éthique articule l’intersubjectif, l’environnemental et le civique, et vise à réhabiliter l’idéal d’émancipation par la justice sociale qui trouve son origine chez les Lumières (Ethique de la considération, 2018). Jacques Rancière, quant à lui, énonce une critique de l’esthétique post-utopique. Il soutient qu’à une époque où les discours et les pratiques ont tendance à faire de l’art une forme divertissante de médiation sociale ou de service public, c’est la radicalité de l’art qui se perd (Malaise dans l’esthétique, 2004) De son côté, Claire Bishop examine les questions esthétiques et éthiques liées aux pratiques collaboratives en se concentrant sur l’évolution des spectateurs (Artificial Hells: Participatory Art and the Politics of Spectatorship, 2012), tandis que le critique d’art G.H. Kester aborde l’art relationnel ou dialogique comme forme contemporaine et globale, et que le travail de Charlotte McIvor Migration and Performance in Contemporary Ireland, Towards a New Interculturalism (2016) considère les pratiques performatives en Irlande dans un contexte marqué par les changements sociaux récents.
En des temps qui en appellent à notre « capacité de réponse » (response-ability) (R. Braidotti, The Posthuman, 2013), cette conférence cherche à mettre en évidence les pratiques et les processus créatifs dans les arts visuels en Irlande, qu’ils perturbent, qu’ils soient interventionnistes, constructifs, ou bien qu’ils permettent d’améliorer les choses (Bishop, Participation, Documents on Contemporary Art, 2006). Dans un contexte de méfiance croissante envers la démocratie représentative qui exige souvent une prise de conscience accrue de la vulnérabilité de l’artiste à créer un » nous » commun (Guillaume Leblanc, Que faire de notre vunérabilité ?, 2011), cette conférence sera aussi l’occasion d’évaluer de façon critique les modalités artistiques ainsi que les stratégies politiques et culturelles.
Les organisateurs invitent les contributions sur les formes et les défis rencontrés par les arts contemporains participatifs en Irlande. Parmi les sujets possibles :
– La prise en compte des questions de citoyenneté au travers de l’éducation et les institutions ; l’activisme et l’art militant ; la participation et la représentation.
– La subjectivité, la question de l’auteur.e et de la maîtrise de l’auteur.e (collectifs d’artistes, artistes individuels), les questions de propriété et de création de contenus ; légitimité ; agency
– Les interactions sociales et culturelles pour aborder les droits et les discriminations fondées sur le sexe, l’âge, l’orientation sexuelle, la nationalité, l’origine, la couleur de peau, la religion, le handicap, la classe sociale, l’éducation, la langue.
– La dimension sociale du post-humain à travers les solidarités locales, nationales et internationales et les initiatives politiques et sociales ; les liens entre l’humain et de l’environnement, les actions pour le climat, la question des frontières.
– Les modèles et méthodes artistiques : recherche-création, résidences et communautés ou collaborations artistiques, pratiques de conservation ; croisements des arts et des sciences, archives et conservation des nouveaux médias ou matériaux ; œuvres publiques et in situ, expérimentations.
– L’impact et traces de l’événement artistique : comment la performance est mémorisée, exposée, documentée, conservée, archivée.
Les résumés de 250 mots en vue des présentations de 20 minutes doivent être envoyés pour le 14 février 2020. Les résumés et une courte notice biographique seront déposés sur le site
https://irishartscom.sciencesconf.org/
Les informations sur les communications retenues seront disponibles d’ici le 7 mars 2020. Les propositions créatives ou les propositions de tables rondes thématiques sont également bienvenues. Pour toute question ou demande d’information, veuillez contacter : anne.goarzin@univ-rennes2.fr ou cecile.maudet@univ-rennes2.fr
Conférenciers invités confirmés :
- Joe Caslin, street artist et illustrateur, Dublin
- David Boyd, directeur du Beat Carnival, Belfast
- Rachel Fallon, artiste plasticienne, Rua Red Gallery, Tallaght
- Fiona Kearney, directrice de la Glucksman Gallery, University College Cork
Cette conférence est organisée sous l’égide du GIS EIRE et du CRBC (U. Rennes), avec la participation de LISAA (UPEM), TIL (U. Bourgogne), CERVEPAS-CREW (U. Paris 3).
Organisateurs :
- Anne Goarzin, Université Rennes 2
- Cécile Maudet, Université Rennes 2
- Hélène Alfaro-Hamayon, UPEM, Université Paris-Est
- Valérie Morisson, Université de Bourgogne
- Fabrice Mourlon, Université Sorbonne Nouvelle-Paris 3
Le colloque se tiendra
Hôtel Pasteur
2 Place Pasteur
35000 RENNES
Call for Papers
PARTICIPATION :
MAKING COMMUNITY IN CONTEMPORARY IRISH ARTS
University of Rennes 2, France, 4-5 June 2020
In recent years, artists in Ireland have taken part in and sometimes spearheaded the campaigns for Marriage Equality (2015) or for abortion rights (2018) through collectives like the Artist’s Campaign to Repeal the Eight, and, with Brexit looming large, artists have initiated participatory projects with local border communities. The question of human rights has been central to artistic creation in Northern Ireland since the mid-1990s however, with the channeling of European funds through international bodies and the Special European Union Programmes Body (SEUPB) leading to the professionalization of community arts and the growth of socially engaged arts projects. On the European scale, the involvement of arts organizations in cultural networks such as Trans Europe Halles (TEH) or Caravan has contributed to anchoring Irish arts in Europe and strengthening partnerships among practitioners championing social engagement and the defence of Human Rights. Programmes such as Creative Europe have allowed artists’ collectives to obtain funding for transnational projects reaching out to communities regardless of national border (‘Corners of Europe’, 2010 and 2016). Have these initiatives had a lasting impact, and what have been the challenges in implementing the recommendations of the UNHC’s High Commission to “increas[e] social interactions, mutual understanding and trust that can be built or rebuilt through these initiatives”?
Contemporary collaborative projects, happenings and performance art that induce interaction with the spectator are increasingly premised on ethical readings. Nicolas Bourriaud’s seminal work Relational Aesthetics (2002) inaugurated a change in critical approaches to art by focusing on the inter-human aspect of art practices and emphasizing proximity as a means of resisting an increasing fragmented society. More recently, Corine Pelluchon calls for an “ethics of consideration” to reconcile theory and practice and reason and affect in the context of a pluralistic, multicultural democracy endowed with tremendously powerful technologies. This ethics should articulate the intersubjective, the environmental and the civic, and aim to restore faith in the ideal of emancipation through social justice prompted by Enlightenment philosophy (Ethique de la considération, 2018). Jacques Rancière, on the other hand, offers a critique of post-utopian aesthetics. He contends that in a time when discourses and practices tend to make art into an entertaining form of social mediation or public service, what is lost in ethics is the radicality of art (Malaise dans l’esthétique, 2004). Claire Bishop examines the aesthetic and ethical issues triggered by collaborative practices, focusing on the evolution of spectatorship (Artificial Hells: Participatory Art and the Politics of Spectatorship, 2012) while art critic Grant H. Kester approaches relational or dialogical art as a contemporary global form and Charlotte McIvor’s Migration and Performance in Contemporary Ireland, Towards a New Interculturalism (2016) scrutinizes performative practices in the context of recent social changes in Ireland.
In a time that calls for “response-ability” (R. Braidotti, The Posthuman, 2013) this conference seeks to explore creative practices and processes in Irish visual and performing arts, whether they are “disruptive and interventionist [or…] constructive and ameliorative” (Participation, Documents on Contemporary Art, 2006). It will also offer an opportunity to critically assess artistic modalities, as well as political and cultural agendas, in a context of growing distrust for representative democracy which often demands increased awareness of the artist’s own vulnerability in creating a common “we” (Guillaume Leblanc, Que faire de notre vunérabilité?, 2011).
The organisers invite submissions for papers exploring the forms and challenges met by participatory contemporary arts in Ireland. Possible topics include, but are not limited to :
- Engagement with issues of citizenship through education and institutions; activism and militant art ; participation and representation.
- Subjectivity and authorship or authorial control (artist collectives, single artists), ownership and contents creation ; legitimacy ; agency and control.
- Social and cultural interactions in order to address rights and discriminations based on gender, age, sexual orientation, nationality, origins, skin colour, religion, disabilities, class, education, language.
- The social dimension of the posthuman through local, national and international solidarities and political and social initiatives ; the entanglement of the human and the environment, climate action, borders.
- Artistic models and methods : research-creation, residencies and artistic communities or collaborations, curatorial practices ; cross-overs of arts and sciences, new media or materials archives and conservation; public and site-specific works, experimentations.
- Impact and traces of the art event : how the performance is remembered, exhibited, documented, curated, archived.
The deadline for abstracts for 20-minute presentations is 14 February 2020. The 250-words abstracts and a short biographical note should be uploaded on the conference website :
https://irishartscom.sciencesconf.org/
Information on accepted papers will be available by 7 March 2020. We also welcome proposals for creative contributions, round tables and thematic discussion panels. For questions and queries, please contact : anne.goarzin@univ-rennes2.fr ou cecile.maudet@univ-rennes2.fr
Confirmed invited speakers and artists
- Joe Caslin, street artist and illustrator, Dublin
- David Boyd, director of the Beat Carnival, Belfast
- Rachel Fallon, visual artist, Rua Red Gallery, Tallaght
- Fiona Kearney, director of The Glucksman Gallery, University College Cork
This conference is organized under the auspices of GIS EIRE and of CRBC (U. Rennes), with the participation of LISAA (UPEM), TIL (U. Bourgogne), CERVEPAS-CREW (U. Paris 3).
Organisers :
- Anne Goarzin, Université Rennes 2
- Cécile Maudet, Université Rennes 2
- Hélène Alfaro-Hamayon, UPEM, Université Paris-Est
- Valérie Morisson, Université de Bourgogne
- Fabrice Mourlon, Université Sorbonne Nouvelle-Paris 3
The conference will be held at
Hôtel Pasteur
2 Place Pasteur
35000 RENNES