La branche stéphanoise du laboratoire IHRIM, Institut d’Histoire des Représentations et des Idées dans les Modernités, lance un appel à communication pour une journée d’étude le 9 juin, à l’université de Saint-Etienne, sur Plurivocalité et polyphonies : une voie vers la modernité? Calquée sur le grec, la polyphonie s’applique à la musique vocale avant de devenir au XXe siècle un outil d’analyse littéraire (Bakhtine, M., La poétique de Dostoïevski, Paris, Seuil, 1998, [1929]). En ce sens, elle est d’abord la réalisation romanesque du concept épistémologique bakhtinien de dialogisme, mais, dans l’analyse du discours, elle désigne plus généralement les moyens d’expression propres à produire des formes et des genres littéraires variés. Le terme, souvent compris également comme simple « pluralité des voix narratives », se rapproche ainsi de la notion de plurivocalité, désignant un champ plus étroit de la polyphonie textuelle. Il convient donc de parler de polyphonies au pluriel et de spécifier en littérature si l’on a affaire à la fragmentation de l’instance énonciatrice romanesque en plusieurs relais narratifs, ou à la pluralité des voix au sens large (au théâtre par exemple), ou encore à des fragments de discours hétérogènes (lettres, récits enchâssés, allusions intertextuelles…). Les applications phonologiques du concept sont même à envisager quand elles éclairent le rôle primordial de la polyphonie en poésie, lieu de la conjonction de la voix qui fait entendre le son et de la voix poématique qui produit l’énoncé. On peut aussi réfléchir aux pratiques linguistiques impliquant le passage d’une langue à l’autre, notamment entre langues régionales et langues perçues comme dominantes. En musicologie, une réflexion sur les polyphonies, comme mise en simultanéité d’entités sémantiques diverses, offre des perspectives variées. D’autres domaines des arts interviennent dans cette réflexion s’ils s’articulent autour du passage à la modernité et de sa définition. Les moyens spécifiques mis en jeu pour représenter différents types de polyphonie entre le XVIe et le XVIIIe siècle pourront être étudiés afin de mieux comprendre le rapport entre ce concept et la modernité, avant sa réutilisation contemporaine. Modernité : rupture, changement, échange, dialogue, affrontement ?
Toutes les zones géographiques sont à envisager dans la littérature européenne. Dans le domaine des langues, le plurilinguisme sera par exemple à considérer dans la perspective de la revendication de la modernité par ceux qui recommandent le recours au bilinguisme ou, au contraire, son abandon. S’intéresser par ailleurs, en musicologie, aux chansons à plusieurs textes, aux chansons traduites, aux chants sacrés en latins devenus profanes en langues vulgaires (et vice-versa)… seront des pistes possibles. La polyphonie sera aussi à définir comme pierre angulaire de la naissance des premiers romans modernes, antérieure à l’étape plus contemporaine de la polyphonie bakhtinienne, et à interroger en poésie, par exemple dans le cadre d’une certaine pérennité moderne du sonnet.
Les propositions de communication, de 1000 caractères maximum soit 10 à 12 lignes, et accompagnées d’une brève bio-bibliographie, devront être adressées à Rafaèle Audoubert (rafaele.audoubert@univ-st-etienne.fr /et/ rafaeleaudoubert@yahoo.fr) avant le 20 janvier 2020. Les réponses aux propositions seront apportées après examen de celles-ci pour le 24 février 2020. La journée d’étude sera organisée à l’Université de Saint-Etienne le mardi 9 juin 2020.