21 et 22 novembre 2018 Université de La Réunion, France Du gage d’affection à l’archive : Culture matérielle et domaine de l’intime dans les sociétés de l’océan Indien

Colloque international pluridisciplinaire – Université de La Réunion, France
Appel à contributions

Du gage d’affection à l’archive : Culture matérielle et domaine de l’intime dans les sociétés de l’océan Indien

Avec le soutien de l’Observatoire des Sociétés de l’Océan Indien (O.S.O.I.- FED 4127) Porté par les laboratoires D.I.R.E. (EA 7387) et L.C.F. (EA 4549)

21 et 22 novembre 2018 Campus Moufia U.F.R. Lettres et des Sciences Humaines, Saint-Denis, La Réunion (France)

Il est bien délicat d’écrire l’histoire des sentiments, du quotidien ou de restituer des comportements. Comme le souligne l’historien Alain Corbin, la redécouverte du passé se heurte souvent au silence : « on ne peut pas faire l’histoire de la vie privée de ceux qui n’ont pas laissé de traces » . Les attitudes privées des « personnes marginales ou marginalisées par la société » dont les vies ne font que de brèves irruptions dans les archives seraient-elles condamnées à le rester ?

Ayant pour ambition de contribuer au dynamisme actuel des recherches sur l’histoire et la culture des sociétés de l’océan Indien, ce colloque s’attachera à la redécouverte d’éléments matériels qui nous renseignent sur le domaine de la vie privée et de l’affectif dans l’espace indiaocéanique . Comment a-t-on donné forme, donné corps à l’amour à travers les objets, les images, hier et aujourd’hui ? Tout comme la première journée intitulée ‘Témoins d’amour, témoins de vie : Objets et images de l’intime’ qui s’est tenue le 12 novembre 2015, cet événement se veut axé sur une lecture de ces preuves, de ces témoins du sentiment et du discours amoureux à travers les siècles. L’un des enjeux principaux sera d’interroger les fonctions de l’objet matériel dans les échanges privés et dans la sphère de l’intime, ce « fond du fond de l’âme » .

Matérialiser le sentiment amoureux révèle différemment la relation à l’autre et conforte les émotions à exprimer. Les offrandes à l’être aimé sont autant de témoins de la relation amoureuse, autant de preuves, de traces de subjectivités passées. Elles sont des gages d’amour. Dans La nuit suprême, de Rabindranath Tagore, la mémoire du lien sensuel entre le jeune narrateur dédaigneux et sa promise, mariée à un notable en son absence, est ravivée par le bruissement des étoffes et le tintement des bracelets, par le parfum, émanation de son intimité de femme . Les présents peuvent aussi supposer un contrat et, de ce fait, s’avérer aliénants. Prolongement du corps de l’autre absent, comme réifié, l’objet devient, à son tour, fétiche. Le concept de culture matérielle que l’historien Jules Prown définit comme « l’étude, à travers les objets fabriqués associés à une communauté ou à une société, des croyances, des valeurs, des idées, des attitudes et des présuppositions » , sera au cœur de nos discussions. Dans quelle mesure le rapport des femmes et des hommes aux objets matériels nous renseigne-t-il sur les relations entre les sexes et le domaine de l’intime ?

Si les objets retrouvés sont un moyen de découvrir le passé et de lutter contre l’oubli de moments intimes, échos de générations disparues, ils sont également une source d’information clé sur notre rapport à l’histoire et sur la pratique des historiens. Comme le soulignait Michel de Certeau, les éléments sélectionnés et mis en valeur par l’historien, deviennent une œuvre mémorielle, un monument à part entière . Quel statut revêt l’objet, fragment de vie intime, que l’on dévoile au public ? Qui décide de le dévoiler ? La frontière entre le privé et le public, la notion de patrimoine, de descendance seront des éléments clés de ce colloque. On prendra en compte l’évolution de l’objet offert à travers le temps et les multiples lectures qui peuvent en résulter. On abordera aussi la question de l’histoire populaire, familiale pratiquée par les historiens dits ‘amateurs’ afin de mettre à jour l’importance des contributions de ces passionnés d’histoire.

Les sujets abordés pourront avoir une dimension non seulement écrite, visuelle (images, arts visuels) mais également tactile (objets fabriqués, matériaux divers), gustative (colis de nourriture), sonore ou olfactive – c’est le pétale odorant de son jasmin que joint le poète à sa lettre d’amour. Les preuves, anciennes ou récentes, seront analysées à travers un questionnement constant de la relation à l’autre.

La réflexion s’organisera, sans pour autant y être limitée, autour des volets thématiques suivants:

1. Histoire de la vie privée et objets matériels : archéologie du quotidien, relations amoureuses et sexualité, vie privée et vie publique.

2. Conservation, archives de l’océan Indien : L’objet comme élément du patrimoine, véhicule de la mémoire collective et individuelle, les politiques de conservation des objets et reliques (musées, bibliothèques, archives), l’historien au service de la mémoire, du patrimoine, les contributions des historiens ‘amateurs’, relation entre histoire familiale, populaire et histoire universitaire.

3. Spécificité des objets de la zone océan Indien : le rôle du fétichisme, la question du tabou, l’objet œuvre d’art au service du langage amoureux, l’objet comme signe (langage et connaissance, symbole, indice), l’imaginaire social : le statut de l’objet qui cristallise les peurs, les désirs, la mémoire.

Les propositions de communication (400 mots maximum), seront à renvoyer par courriel, avant le 30 janvier 2018, accompagnées d’une courte notice biographique aux deux organisatrices de l’événement : Françoise Sylvos, francoise.sylvos@wanadoo.fr Florence Pellegry, florence.pellegry@univ-reunion.fr

Le résultat de la sélection des propositions sera communiqué le 15 Mars 2018.

Les propositions seront étudiées par le comité scientifique de la conférence :

Pr Géraldine Chouard (Université Paris-Dauphine)
Pr Evelyne Combeau-Mari, (Université de la Réunion)
Dr Florence Pellegry, (Université de la Réunion)
Dr Sandra Saayman (Université de la Réunion)
Pr Françoise Sylvos, (Université de la Réunion)
Pr Vilasnee Tampoe – Hautin, (Université de la Réunion)
Pr Gilles Teulié (Université d’Aix-Marseille)
Pr Nira Wickramasinghe, (Université de Leiden, Pays-Bas)

Les présentations en français ou en anglais seront de 20 minutes, suivies de 10 minutes de discussion.

Frais d’inscription des intervenants : 50 euros (35 euros pour les doctorants et les retraités).

Une sélection d’articles sera publiée à l’issue de ce colloque.

Mots clés : objet, histoire de la vie privée, domaine de l’intime, amour, mémoire, imag(inair)e, océan Indien

International conference – University of Reunion Island, France – Call for papers

From Tokens of Love to Archived Relics:
Private Life and Material Culture in Indian Ocean Societies

Sponsored by the Observatory for Indian Ocean Societies (O.S.O.I.- FED 4127),

D.I.R.E. (E.A. 7387) and L.C.F. (E.A. 4549) research laboratories

21st and 22nd of November 2018

Moufia Campus, Arts and Social Sciences Faculty
Saint-Denis, La Réunion (France)

Writing the history of the private lives of individuals is no easy task. As pointed out by French historian Alain Corbin, any attempt to rediscover such a past is practically doomed to failure as “one can’t write the history of the private life of those who have left no trace” . Are the private attitudes of those who are “marginal to or marginalized by society” , or those whose lives appear only briefly in archives, condemned to remain only briefly and superficially documented? Contributing to the current dynamic wave of scientific research on the history and cultures of Indian Ocean societies, this conference will discuss material culture relating to private and emotional life in the Indian Ocean region . How have past and present societies given shape and depth to affection and emotion and to feelings of love through material culture? In a vein similar to the initial research seminar entitled ‘Témoins d’amour, témoins de vie: Objets et images de l’intime’ held on the 12th of November 2015, this conference will focus on the study and interpretation of love tokens and other reflections, representations and expressions of romantic and sentimental feelings and discourses over the centuries. One of the main concerns will be to question the functions and meanings of these material objects in intimate exchanges or in what Jules Barbey d’Aurevilly qualifies as the “deepest corners of the soul” . If giving shape to love and affection enables us to cast a different light on the question of the relation to the other, it also acts as a confirmation of the authenticity of the emotions being expressed: the gifts made to a loved person are tangible proof of the very existence of the love relationship, and as love tokens, they are likewise evidence of past subjectivities. In Rabindranath Tagore’s The Supreme Night, the memory of the sensual link which unites the disdainful young narrator to his would-be bride (who is incidentally wedded to a notary in his absence) is brought back by the sound of rustling fabric and the tinkle of bracelets and by the fragrance of her feminine intimacy . Gifts can also testify to the existence of a contract and thus become a source of alienation. Just like a protraction of the body of the other, absent but reified, the object becomes, in its turn, a fetish. The concept of a material culture, defined by art historian Jules Prown as “the study through artifacts of the beliefs — values, ideas, attitudes, and assumptions — of a particular community or society at a given time” , will be at the heart of our discussions. To what extent do people’s relation to objects inform us of the relations between sexes and on intimacy? If objects are a means of discovering the past and working against the oblivion of intimate moments, echoes of past Indian Ocean generations, they are also a key source of information and knowledge of our relation to history and the very practice of historians. As underlined by French scholar Michel de Certeau, the elements selected and highlighted by a historian become a work of memory, a monument of its own . What is the status of the object, a fragment of intimacy, which is unveiled to the public? Who decides to unveil the object? The boundary between the private and public spheres, the notion of heritage, but also of posterity will be vital questions addressed by this conference. It will also examine other aspects of intimacy such as the multiple readings and interpretations of the object at different points in time and space, and the question of popular and family history, with a focus on the amateur historians’ contribution to our general understanding of the past. We welcome a diversity of formats ranging from the visual and the written to the tactile and the three-dimensional, to the gustatory, the audible and the olfactory (photographs, texts, correspondence, food packaging, scented jasmine petals found in love letters…). These tokens, whatever their age, will be analyzed as a means of questioning the relation to the other. This event will be organized along (but not limited to) the following themes: 1. History of private life and material objects: archaeology of daily life, love relations and sexuality, private and public life.

2. Conservation and archives of the Indian Ocean: The objects as vessels for heritage, collective and individual memory, conservation policies regarding objects and artefacts (museums, libraries, archives), the historian and memory, heritage, amateur historians and their contributions, the relation between family, popular and academic history.

3. Specificity of the objects of the Indian Ocean region: Role played by fetishism, the question of taboo, the object as work of art expressing love, the object as a sign (language and knowledge, symbol, hint), the social imagination: the status of the object which crystalizes people’s fears, desires, and memory.

The speech proposals (400 words max.) along with a short biographical note are to be sent before the 30th of January 2018 to both organizers: Françoise Sylvos, francoise.sylvos@wanadoo.fr Florence Pellegry, florence.pellegry@univ-reunion.fr

The selection will be confirmed by the 15th of March 2018. The proposals will be studied by the scientific committee for the conference: Pr Géraldine Chouard (Université Paris-Dauphine) Pr Evelyne Combeau-Mari, (Université de la Réunion) Dr Florence Pellegry, (Université de la Réunion) Dr Sandra Saayman (Université de la Réunion) Pr Françoise Sylvos, (Université de la Réunion) Pr Vilasnee Tampoe – Hautin, (Université de la Réunion) Pr Gilles Teulié (Université d’Aix-Marseille) Pr Nira Wickramasinghe, (University of Leiden, Netherlands) The oral presentations in French or in English will last 20 minutes each followed by a 10-minute discussion. Registration fee for all speakers: 50 euros (30 euros for doctoral students or retired academics). A selection of articles will be published in a bilingual volume after the conference.

Key words: Object, history of private life, love, memory, imagination, Indian Ocean


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