Cette journée d’étude propose une réflexion sur le rôle des émotions en politique telles que définies notamment par George E. Marcus dont les travaux, loin de valider l’opposition classique entre l’émotionnel et le rationnel, tendent à réhabiliter les émotions en tant que composantes essentielles de la rhétorique et de l’action politique mais aussi des processus de participation citoyenne et des nouvelles formes d’engagement militant. Crise de la représentativité et déclin des idéologies contribuent à expliquer cette place nouvelle des émotions dans la vie politique.
Alors que les pratiques de démocratie participative se multiplient, l’objectif de ce projet est d’étudier les caractéristiques des dispositifs de sensibilisation mis en œuvre en les reliant à la spécificité des contextes nationaux et à la conflictualité déclenchée par certaines crises politiques (Brexit, processus indépendantiste en Catalogne, mouvement des Indignés, montée des populismes, crises migratoires, émergence des mouvements nationalistes, etc.). Il s’inscrit ainsi dans une démarche pluridisciplinaire et comparative dans le but d’impliquer des chercheurs travaillant sur des aires géographiques différentes et des corpus distincts tels le discours politique, la presse ou les nouvelles technologies de communication. Une telle collaboration permettrait de confronter outils conceptuels et analyses afin d’interroger les enjeux liés à l’utilisation de ce registre émotionnel à la fois dans les discours institutionnels et dans les nouvelles formes de contestation et de mobilisation collectives.
Pour aborder ces différentes thématiques, la réflexion, centrée sur le XX^e et le XXI^e siècles, s’organisera en plusieurs axes :
— L’importance de la dimension émotionnelle dans les discours politiques produits en situation de crise. Il s’agira d’analyser les stratégies mobilisées par les différents acteurs institutionnels dans un contexte de défiance démocratique en interrogeant les conditions qui favorisent l’émergence de cette rhétorique émotionnelle.
Quels sont les procédés discursifs utilisés et/ou les thématiques privilégiées pour susciter les réactions émotionnelles permettant d’agir sur la construction des positionnements idéologiques des citoyens ?
Dans quelle mesure ces ressorts émotionnels contribuent-ils à la mise en place de dispositifs participatifs ?
Quelles sont, dans ces dynamiques de confrontation, les spécificités du discours populiste ?
– – Les stratégies émotionnelles des mouvements protestataires dans les espaces publics contemporains. Il s’agira d’interroger la dimension affective de l’engagement citoyen dans les nouvelles formes de participation à la vie publique à travers une étude des discours, répertoires d’action collective et symboles/signes identitaires de ces mouvements (mouvements écologistes, luttes féministes, associations de victimes, assemblées citoyennes, mouvements autonomistes et indépendantistes, etc.).
Comment les ressorts affectifs mobilisés dans les argumentaires de ces collectifs citoyens contribuent-ils à créer des solidarités culturelles ?
Dans quelle mesure les mécanismes à l’œuvre dans la construction de ces émotions peuvent-ils favoriser une culture de l’insoumission ?
– – Une analyse des processus émotionnels convoqués dans le discours médiatique et les nouvelles technologies de l’information. Il s’agit de conduire une réflexion sur le rôle des différents dispositifs de la médiatisation quant à la production et diffusion des affects dans des contextes de conflits ou bouleversements politiques.
Quel est l’impact des technologies numériques sur les pratiques collaboratives et la structuration des mouvements sociaux ?
Comment les réseaux sociaux, via l’utilisation d’une rhétorique émotionnelle, témoignent-ils de l’évolution des engagements collectifs et individuels ?
Quelles peuvent être les dérives de ce type de communication (manipulation liée aux campagnes de désinformation, peurs générées par les /fake news/) ?
La date limite d’envoi des propositions comprenant un titre provisoire et un résumé (300-500 mots) est fixée au 15 mai 2020.
Elles seront à adresser conjointement à :
David Bousquet (david.bousquet@u-bourgogne.fr <mailto:david.bousquet@u-bourgogne.fr>)
Alexandra Palau (atpalau@yahoo.fr <mailto:atpalau@yahoo.fr>)
Réponse du comité scientifique : 15 juin 2020.
La journée d’étude donnera lieu à une publication.
Les langues utilisées peuvent être le français, l’espagnol ou l’anglais.