20-21 juin 2019 Université de Paris-Est Créteil Le retour de la Rust Belt à l’heure des populismes : lieux, enjeux, stratégies

 

Ce projet de colloque prévoit d’interroger l’objet géographique « Rust Belt » (ceinture de la rouille) sous différents éclairages thématiques, méthodologiques et disciplinaires. La Rust Belt désigne de manière assez imprécise la région désindustrialisée située autour des Grands Lacs du Nord des Etats-Unis, recouvrant tout ou partie du Wisconsin, du Michigan, de l’Illinois, de l’Indiana, de l’Ohio, de la Virginie occidentale, de la Pennsylvanie, ainsi que certains comtés du nord-ouest de l’Etat de New York).

Du fait de son passé minier et industriel, cette région a longtemps constitué un bastion démocrate qui semblait définitivement hors de portée des républicains, au moins au niveau présidentiel. Son déclin démographique se traduisant par un poids moindre dans le collège électoral, les Etats composant la Rust Belt ne semblaient plus représenter un enjeu électoral majeur. Pourtant, les travaux de Jefferson Cowie ont montré comment la classe ouvrière s’est éloignée de la coalition rooseveltienne, de même que les travaux de Thomas Frank ont interrogé le paradoxe apparent du vote des « pauvres » contre leurs intérêts économiques immédiats (et donc en faveur des candidats républicains). Justin Gest, dans un terrain comparatif transatlantique [The New Minority, OUP, 2016] a également montré comment le sentiment d’abandon a pu nourrir un populisme traduit par le vote Trump d’un côté (mais aussi dans une certaine mesure le vote Sanders) et le Brexit au Royaume-Uni.

Ainsi, aux Etats-Unis, la campagne présidentielle de 2016 a nettement contribué à replacer la Rust Belt au cœur de l’attention médiatique et politique. La région a permis à Donald Trump de basculer en tête au sein du collège électoral.

Stanley Greenberg, qui avait mis en évidence les « Reagan Democrats » dans les années 1980, a ainsi pu interroger les « Trump Democrats » de 2016, des électeurs qui ont ou auraient pu voter démocrate mais qui ont plébiscité Donald Trump. D’autres enquêtes ont également montré dans quelle mesure une partie de l’électorat du Midwest (Indiana) et de la Rust Belt pouvait, le même jour, voter pour un candidat démocrate au niveau local et pour Donald Trump à la présidence.

Plus récemment, en mars 2018, la victoire du « Blue Dog Democrat » Conor Lamb dans une circonscription de Pennsylvanie largement emportée par Trump en novembre 2016a relancé le débat autour de la capacité de démocrates à reconquérir ce qui semblait être devenu « Trump Country ».

Si tous les populismes ne s’ancrent pas uniquement sur des terrains en situation de désindustrialisation comparables à la Rust Belt américaine, la réciproque se vérifie : les « Rust Belts » sont des terreaux fertiles pour l’essor des mouvements populistes, de gauche comme de droite.

C’est dans ce contexte de poussée populiste aux Etats-Unis et en Europe que la Rust Belt (re)devient un objet décisif dans le paysage culturel et politique aux Etats-Unis. Mais c’est également une région en mutation, partiellement en renouveau, qui échappe aux clichés trop manichéens de la région totalement en décrépitude, laissée pour morte par les politiques et les médias au profit de la Sun Belt, de la Californie à la Floride en passant par le Texas et la Virginie.

Ce colloque, prévu pour juin 2019, a pour ambition d’entreprendre un état des lieux de la Rust Belt, dans un contexte fortement marqué par les échéances électorales, entre les élections de mi-mandat de novembre 2018 et les différentes élections, notamment présidentielle, de 2020.

Les organisateurs souhaitent solliciter des communications regroupées autour des pôles suivants :

— Impact électoral de la résurgence et transformations des villes (centres urbains ; gentrification, transports, innovation technologique et industrielle). Par impact électoral, on entend à la fois le niveau fédéral (présidence, Congrès) et local (Chambre et Sénat de l’Etat), notamment en cas de votes distincts (« Trump Democrats »).

— Transformation (diversification démographique, sociale et politique) des différents cercles des banlieues résidentielles (suburbs, exurbs).

— Les défis économiques et sanitaires (mortalité précoce, crise des opioïdes) auxquels sont confrontées les zones rurales et les petites villes.

— L’impact de deux ans de politique de Trump sur la frontière entre Canada et Etats-Unis, dans le cadre de l’ALENA. Les liens transfrontaliers avec les provinces et les métropoles canadiennes.

— Les évolutions politiques locales, notamment les campagnes anti-syndicats et les « right-to-work laws ».

— Les batailles autour du découpage des circonscriptions (gerrymandering) et la fabrication d’équilibres et déséquilibres de la représentation de la population locale, notamment suite à l’invalidation de la carte des circonscriptions de Pennsylvanie par la Cour suprême de l’Etat.

— Les ressources énergétiques (charbon, pétrole de schiste) et les enjeux climatiques ; impact sur l’emploi et impact électoral.

— Les perceptions et représentations de la Rust Belt dans le cinéma et les séries depuis l’an 2000.

— Comparaisons avec les régions voisines : Midwest plus rural qu’industriel, Appalaches ; comparaisons, le cas échéant, avec les « Rust Belts » européennes (bassins miniers britanniques, de Lorraine et des Hauts de France, de la Ruhr…)

 

Les propositions de communication, d’environ 300 mots sont à envoyer à fdechantal@univ-paris-diderot.frlauric.henneton@uvsq.frguillaume.poiret@u-pec.fr avant le 15 octobre 2018, avec une brève présentation bio-bibliographique.

 

Comité d’organisation : Guillaume Poiret (UPEC), François Vergniolle de Chantal (Université Paris Diderot), Lauric Henneton (UVSQ)

Comité scientifique :

Frédérick Gagnon (Chaire Raoul Dandurand, Université du Québec à Montréal, Canada)

Justin Gest (George Mason University, Etats-Unis)

Lauric Henneton (Université de Versailles Saint-Quentin-en-Yvelines)

Denis Lacorne (CERI, Sciences Po)

Renaud Le Goix (Université Paris Diderot) 

Michael McQuarrie (London School of Economics, UK)

Guillaume Poiret (Université Paris-Est-Créteil)

François Vergniolle de Chantal (Université Paris Diderot)

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Call for papers

 

The return of the Rust Belt and the populist moment

 

Université de Paris-Est Créteil, June 20-21 2019

 

This conference considers the “Rust Belt” through various thematic, methodological and disciplinary angles. The Rust Belt is a rather loose name for the deindustrialized region around the Great Lakes, encompassing all or parts of the states of Wisconsin, Michigan, Illinois, Indiana, Ohio, West Virginia, Pennsylvania as well as several northwestern counties of New York state.

Because of its mining and industrial past, this region used to be a solid Democratic stronghold, clearly out of the reach of Republicans, at least at the level of presidential elections. Its demographic decline after World War 2 led to a lesser weight in the electoral college and it seemed to have lost any decisive role in nationwide ballots. However, Jefferson Cowie’s work has shown how the working class has shifted away from the Rooseveltian coalition while Thomas Frank has highlighted the apparent paradox of poor people who voted against their immediate economic interests (and for conservative Republican candidates). In a recent transatlantic study, Justin Gest has convincingly demonstrated how the sense of dispossession and abandonment contributed to boost populism, as in the Trump vote on one side of the Atlantic and the Brexit vote on the other (The New Minority, OUP, 2016).

In the United States, the 2016 presidential election has unquestionably put the Rust Belt back on the electoral map and has reawakened long-gone media interest in it. Indeed, small majorities in a few Rust Belt states enabled Donald Trump to carry those states and their electors and gave him a majority in the Electoral college, despite trailing Mrs Clinton in the popular vote.

Stanley Greenberg, who identified the “Reagan Democrats” in the 1980s, interviewed the “Trump Democrats” in 2016 – those voters who used to cast ballots for Democratic candidates but chose to support Trump this time. Other investigations have shown that voters in such Midwestern states as Indiana as well as in the Rust Belt could vote for a local Democrat as well as Donald Trump for President on the very same day.

More recently, in March 2018, the victory of “blue dog” Democrat Conor Lamb in a Pennsylvania district that Trump had carried easily in 2016 reignited the debate around the Democrats’ ability to reconquer what had come to be known as “Trump country.”

If populism is not to be found exclusively in deindustrialized areas such as the Rust Belt, it remains clear that “Rust Belts” are fertile soil for populist movements on the left as much as on the right of the political spectrum.

It is in this context of rising populism in the United States and in Europe that the Rust Belt becomes (again) an invaluable object of interest in the political and cultural landscape in the United States. Yet it is also a region that has been undergoing tremendous (urban) renewal, whose economy has adjusted to the new Millennium, far from the Manichean stereotypes of decay and a region that had been long been ignored by journalists and politicians as opposed to the Sun Belt, from California and Texas to Florida and Virginia.

This conference, to be held in June 2019, aims to reexamine the Rust Belt between the midterm elections of November 2018 and the presidential and congressional elections of 2020, where the role of the Rust Belt may again be decisive.

Proposals should try to fit one or several of the following categories:

— The rebirth of cities and its electoral impact (urban renewal, gentrification, transportation, technological and industrial innovation). Electoral impact is understood at the federal level (Presidency, Congress) and at the local level (state assemblies, especially in cases of split voting, e.g., Trump Democrats).

— The transformations in the various rings of suburbs and exurbs (demographic, social and political diversification).

— Economic and health challenges (“deaths of despair,” decreasing life expectancy, opioid crisis) affecting rural communities and small towns.

— The impact of two years of “Trumponomics” on the US-Canada border in the context of NAFTA and its renegotiation, the transborder connections and fluxes between the US and Canadian metros and provinces.

— Local political changes, in particular in the context of anti-labor, “right-to-work” laws.

— The battles around gerrymandering and the partisan distortion of local representation, in the context of Court decision invalidating exaggeratedly partisan maps (Pennsylvania, North Carolina).

— Energy (coal – clean or not – and shale oil) and environmental issues, as well as their impact on jobs and elections.

— The perceptions and representations of the Rust Belt in films and TV series since 2000.

— We also invite comparisons with neighboring regions (the more rural Midwest, Appalachia) as well as with other Rust Belts in Europe (mining regions in Britain, North and Eastern France, the Ruhr in Germany).

 

Proposals, about 300 words, should be sent to fdechantal@univ-paris-diderot.frlauric.henneton@uvsq.frguillaume.poiret@u-pec.fr by Oct. 15, 2018, along with a brief bio / bibliographic introduction.

Organizing committee : Guillaume Poiret (UPEC), François Vergniolle de Chantal (Université Paris Diderot), Lauric Henneton (UVSQ)

 

Scientific committee :

Frédérick Gagnon (Chaire Raoul Dandurand, Université du Québec à Montréal, Canada)

Justin Gest (George Mason University, United States of America)

Lauric Henneton (Université de Versailles Saint-Quentin-en-Yvelines, France)

Denis Lacorne (CERI, Sciences Po Paris, France)

Renaud Le Goix (Université Paris Diderot, France) 

Michael McQuarrie (London School of Economics, UK)

Guillaume Poiret (Université Paris-Est-Créteil, France)

François Vergniolle de Chantal (Université Paris Diderot, France)

 


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