« Tous les yeux s’étaient levés vers le haut de l’église. Ce qu’ils voyaient était extraordinaire. Sur le sommet de la galerie la plus élevée, plus haut que la rosace centrale, il y avait une grande flamme qui montait entre les deux clochers avec des tourbillons d’étincelles, une grande flamme désordonnée et furieuse dont le vent emportait par moments un lambeau dans la fumée. Au-dessous de cette flamme, au-dessous de la sombre balustrade à trèfles de braise, deux gouttières en gueules de monstres vomissaient sans relâche cette pluie ardente qui détachait son ruissellement argenté sur les ténèbres de la façade inférieure. » Victor Hugo, Notre-Dame de Paris (1831)
Le terrible incendie qui a ravagé Notre-Dame de Paris le 15 avril 2019 a mis brutalement la célèbre cathédrale de plus de huit siècles au centre d’une attention planétaire. Le vénérable édifice qui avait fait face à la Révolution française, aux deux Grandes Guerres, à l’érosion et à la pollution atmosphérique, a été en partie détruit sous des flammes provoquées (l’enquête le déterminera) par la négligence de l’homme. Devant le gigantesque chantier qui s’ouvre désormais sur la reconstruction de ce joyau de la culture française et du patrimoine mondial, il serait impossible d’oublier que Notre-Dame de Paris avait déjà fait l’objet d’un important acte de sauvetage par l’écrivain Victor Hugo (1802-1885). Ressuscité grâce à son roman Notre-Dame de Paris (1831), l’édifice avait pu continuer à rayonner à travers la culture européenne et mondiale.
Preuves de la vitalité de cet héritage, les nombreuses adaptations à la fois visuelles et littéraires qui s’adressent souvent à un jeune public. Qu’il s’agisse de formes abrégées ou/et réécrites pour de jeunes lecteurs-spectateurs, ou bien de dessins animés, jeux numériques, activités pédagogiques, albums ou pièces de théâtre, l’histoire de Quasimodo, le sonneur bossu de Notre-Dame, et de la bohémienne Esméralda, accusée de meurtre et de sorcellerie, constitue un récit universel qui n’a cessé de nourrir l’imaginaire des générations successives. Ce sont ces réminiscences qu’il convient d’envisager au cours de cette journée d’études, que celles-ci soient conscientes (citation, hommage, adaptation) ou inconscientes (cryptomnésie), dans des œuvres qui s’adressent aux jeunes gens.
A la fois réflexion philosophique sur la différence et l’altérité, et écho lointain aux mythes et aux légendes, les réécritures de Notre-Dame de Paris réfléchissent sur l’architecture et l’Histoire, ou fonctionnent comme des intertextes plus ponctuels dans des récits littéraires ou des scénarios de film. Elles attirent ainsi l’attention sur les mutations thématiques, et sur la variété de supports au service des transferts culturels des œuvres destinées à la jeunesse.
Le célèbre récit romanesque de Victor Hugo invite également à réfléchir sur les continuités esthétiques, poétiques et idéologiques face à un édifice à la fois réel et imaginaire qui incarne – au sens de devenir chair / pierre – le « temps des cathédrales ».
Les propositions, d’environ 1500 mots, indiqueront le corpus d’études et comprendront une rapide présentation biographique et une courte bibliographie.
Cette journée d’études nous permettra de réfléchir ensemble à un ouvrage collectif.
Vous enverrez vos propositions de communication aux adresses suivantes avant le 30 septembre 2019 :
Nathalie Prince : nathalie.prince@univ-lemans.fr
Taïna Tuhkunen taina.tuhkunen@univ-angers.fr
Professeur de littérature comparée à l’Université du Mans, Nathalie Prince est notamment l’auteur de La Littérature de jeunesse. Pour une théorie littéraire (A. Colin, « U », rééd. 2015) et de La Littérature fantastique (A. Colin, 128, 2015).
Professeur d’études américaines à l’Université d’Angers, Taïna Tuhkunen a publié de nombreux articles sur la littérature et le cinéma nord-américains. Son principal ouvrage s’intitule Demain sera un autre jour : le Sud et ses héroïnes à l’écran (Rouge Profond, 2013).