13-14 octobre 2017 Palimpsestes 31 / Colloque TRACT Appel à communication et / ou article Traduire les sens en littérature pour la jeunesse

Palimpsestes 31 / Colloque TRACT 13-14 octobre 2017

 Appel à communication et / ou article

 Traduire les sens en littérature pour la jeunesse

 

 

(scroll down for English version)

 

Centre de recherche en traduction et communication transculturelle anglais-français / français-anglais

 

(TRACT – PRISMES EA 4398 – Université Sorbonne nouvelle- Paris 3)

 

Ce n’est pas un hasard si ce précurseur de l’album moderne qu’est l’Orbis Sensualium Pictus (1658) de l’éducateur tchèque Coménius établit un parallèle entre le plaisir physique découlant de la relation que l’enfant entretient avec le livre par le biais du sens de la vue et son rapport au monde environnant. Cet ancêtre de l’imagier d’aujourd’hui, encyclopédie à l’usage des enfants destinée à apprendre les mots au moyen de la représentation visuelle des choses — en partant de l’axiome d’Aristote et de Thomas d’Aquin selon lequel « Rien n’est dans l’intellect qui ne soit d’abord passé dans les sens »[1] —, exploitait déjà le lien entre le passage d’une langue à une autre et le passage d’un mode à un autre.

De façon significative, la littérature de jeunesse en tant que telle a émergé en Occident, un siècle après la parution de l’ouvrage de Coménius, lorsque la notion de plaisir du texte s’est imposée. Les progrès des techniques d’imprimerie ont ainsi contribué à la place centrale de l’image. L’importance de la dimension non verbale du livre pour enfants a fait de ce corpus une littérature multimodale par essence, non seulement dans les livres numériques actuels et pour les adaptations sur de multiples supports, mais aussi dans le support traditionnel de l’imprimé: les illustrations, la matérialité de l’objet-livre, les jeux de taille, de forme, de matière et de graphisme y suggèrent une manipulation proche de celle procurée par le jouet

(livre animé, kamishibaï, livre accordéon, à toucher, à trous…), renvoyant souvent à une matérialisation de la langue elle-même.

Ainsi, traduire le livre pour enfants signifie bien plus que de traduire le seul texte verbal, et le traducteur n’est qu’une des différentes instances impliquées dans ce processus. Il s’agit aussi de parvenir à la recréation, dans un objet éditorial différent, d’une expérience sensorielle proche de celle générée par l’original.

Parallèlement à cette multimodalité essentielle, la traduction a joué un rôle fondateur dans l’émergence de la littérature de jeunesse dès le XVIIIe siècle, grâce à la richesse des échanges européens retravaillant le même matériau textuel afin de forger et de développer un corpus et un patrimoine enfantins.[2] L’appropriation par la littérature de jeunesse émergente de textes antérieurs trouve un écho dans le recyclage qu’elle opère de textes d’autres langues-cultures. Mais la traduction, indispensable en littérature de jeunesse, vient compliquer encore le rapport déjà complexe sur lequel reposent ces livres. Les livres pour enfants constituent en effet la seule littérature qui se définisse par son lectorat : c’est pourquoi la question du destinataire et de sa spécificité est doublement essentielle lorsqu’il s’agit de traduire ce corpus. La littérature de jeunesse reposant sur un paradoxe fondateur – un auteur adulte tentant de retrouver dans son entreprise d’écriture le point de vue enfantin qu’il a définitivement perdu –, le processus de traduction ne fait que redoubler l’inextricable équilibre adulte/enfant et doit notamment tenir compte des liens sensoriels qui caractérisent cette relation asymétrique[3] dans laquelle les sens tiennent une place essentielle. L’oralité constitue un défi particulier de la traduction de cette littérature : alors que chez le tout-petit, il s’agit de préserver le rapport à la langue maternelle, la voix de l’adulte qui fait la lecture à l’enfant, traduire pour des lecteurs plus âgés implique la transposition dans la langue cible de la musicalité d’une écriture désormais plus résolument multiculturelle et métissée.

 

On pourra s’intéresser, dans le cadre de la traduction de la littérature pour la jeunesse, aux aspects suivants, sans exclusive

  •  la traduction du rapport texte-image dans l’album et dans la littérature graphique
  •   le cas particulier du manga, notamment la traduction des onomatopées comme expression des sens
  •  la traduction des éléments non-verbaux dans les livres pour enfants
  •  l’objet-livre en traduction (mise en page, couleurs, graphisme, matières et textures, format, découpes…)
  •  la traduction de l’oralité et de la musicalité du livre pour enfants, notamment en poésie
  •   la traduction de la multimodalité des livres pour enfants
  •   les spécificités de la traduction de la littérature numérique pour la jeunesse
  •   sens et traduction du nonsense

Les propositions de communications / articles (résumé d’une demi-page, en français ou en anglais), ainsi qu’un bref CV, sont à adresser, pour le 31 mars 2017, date butoir à Clíona Ní Ríordáin (cliona.ni-riordain@univ-paris3.fr) et Virginie Douglas (virginie.douglas@univ-rouen.fr).

 

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Palimpsestes 31 / TRACT Conference 13-14 October 2017 – Sorbonne Nouvelle

 

Call for papers and/or talks

 

Translating the Senses in Children’s Literature

Center for Research in Translation and Transcultural Communication English/French – French/English

 

In Orbis Sensualium Pictus (1658), Comenius, established a parallel between the physical pleasure that results from a child’s relationship with the book and his/her connection to the surrounding world. Comenius’s encyclopaedia enabled children to learn new words through the visual representation of objects. The book relied on the movement between languages and modes of representation, in keeping with the maxim beloved of both Aristotle and Thomas Aquinas: “Nothing is in the intellect that was not first in the senses”[4].

Children’s literature emerged as a distinct genre a century after the publication of Comenius’ work. At that time, the notion of the pleasure of the text became more firmly established. From its earliest stages, the central role of the image in children’s literature was consolidated by printing’s technical progress. The importance of the non-verbal dimension of the children’s book has made it the multimodal corpus par excellence. The materiality of the book as object plays with size, form, texture, and graphics, thus allowing for forms of physical interaction which are close to those provided by toys (pop-up books, kamishibaï, fold-out books, tactile books, lift-the-flap books) which have a strong meta-linguistic dimension.

Translating a book for children implies far more than simply translating the written text. The translator is only one of the different mediators involved in the process of recreating the sensorial experience. Both the text and the relationship between text and image need to be translated, as indeed does the non-verbal dimension of the book (graphics, layout, the texture of the paper).

Translation has played a fundamental role in the emergence of young people’s literature from the 18th century, as illustrated by the development and circulation of a European literary corpus for children, via a continuous process of translation, retranslation, rewriting and adaptation. Since children’s literature is the only genre defined by its readership, the translation required in the expansion of children’s literature further complicated the relationship this corpus had to the translated book. As a result of the founding paradox on which children’s literature is based (the adult writing for the child he once was), the notion of reception and the specificity of the corpus is vital. The translation process reproduces the inextricable equilibrium between the adult and the child. Translation also takes account of the sensorial links that characterize this asymetrical relationship, in which the senses occupy an essential place. For the young reader the connection to his/her mother tongue, the physical presence of the adult and the timbre of the adult’s voice when s/he reads aloud to the child are part of the peculiar challenges that this literature represents. Yet, translating orality for older readers is also difficult, implying the transposition into the target language of the musicality of a form of writing ever more resolutely multicultural and diverse.

 

In the case of the translation of children’s literature the following aspects may be addressed:

  • the translation of the relationship between text and image in children’s picture books and graphic novels
  • the case of manga, especially the translation of onomatopoeia as expressions of the senses
  • the translation of non-verbal elements in children’s books
  • the book as object in translation (layout, colours, graphics, materials, textures, format, cut-outs)
  • the translation of orality and musicality in children’s books
  • the specificities of the translation of e-books for young people
  • the senses/meaning and translation of nonsense

 

Propositions (a half page in English or in French) plus a short CV should be sent, by 31 March 2017 at the latest to Clíona Ní Ríordáin (cliona.ni-riordain@univ-paris3.fr) and

Virginie Douglas (virginie.douglas@univ-rouen.fr).

 

 

 

 

[1] « Nihil est in intellectu nisi prius fuerit in sensu ».

[2] Cf. les travaux d’Isabelle Nières-Chevrel.

[3] Emer O’Sullivan parle de « communication asymétrique » (asymmetrical communication) dans Comparative Children’s Literature.

[4] Nihil est in intellectu nisi prius fuerit in sensu.

 

 

 

 

 


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