Organisatrices : Ariane Mak (EHESS) et Carine Lemouneau Bajaar (Paris I Panthéon Sorbonne)
Date limite d’envoi des propositions : 30 décembre
Face au dynamisme de l’oral history à l’international, l’invisibilisation de l’« histoire orale » en France pose question. Les pratiques historiennes de l’entretien font, aujourd’hui encore, l’objet de relativement peu de discussions dans le paysage universitaire français. Plus nombreux qu’on ne le pense sont pourtant les travaux d’historiens associant une démarche d’enquête orale à l’exploitation des archives écrites. Si l’histoire orale demeure principalement investie par l’histoire sociale, l’histoire des institutions, et l’histoire des conflits et traumatismes collectifs, le recours aux entretiens touche désormais des champs de plus en plus variés. Ainsi l’histoire de l’art en particulier témoigne depuis quelques années d’un intérêt inédit pour l’archive orale à laquelle elle était longtemps restée rétive : le chantier de collecte des témoignages oraux des proches et collaborateurs d’André Chastel en 2014 et la mise en place d’une base d’archives orales de l’art pour la période contemporaine (disponible sur la plateforme Agorha de l’Institut National d’Histoire de l’Art) attestent d’un renouveau des méthodes d’enquête, dépassant le traditionnel entretien d’artiste.
L’objectif de ces journées est donc d’esquisser un état des lieux des travaux des doctorants et jeunes chercheurs en matière d’histoire orale. Elles se veulent un espace de discussion sur les apports, les usages et les enjeux propres à la pratique de l’entretien d’une part, et à l’exploitation des fonds d’archives orales d’autre part. Nous encourageons donc tout particulièrement les jeunes historiens et historiens de l’art à examiner la manière dont ils mobilisent les sources orales dans leurs travaux, et à proposer une réflexion critique sur la constitution et l’exploitation des archives orales.
À travers le croisement des objets d’étude et des terrains, ces journées doctorales visent à mettre au jour les apports pluriels des sources orales. Dans cette perspective, les rapports entre archives écrites et orales nous intéressent au premier chef. Au-delà du recours à l’entretien conçu comme une manière de suppléer aux lacunes des matériaux écrits, quelles formes de jeux et d’articulations plurielles inventer entre archives écrites et orales ? Comment se nouent, dans la pratique, l’enquête orale et l’exploration des archives ?
Il s’agira d’engager une réflexion collective sur la critique de ces sources, soumises plus que toutes autres à la mémoire. Ce faisant, nous proposons d’investir les enjeux de la mémoire comme objet d’étude en soi, en réinscrivant les phénomènes de déformation, d’oublis, de silences et de non dits, de mythologie et d’influences plurielles, dans l’analyse des entretiens.
Par ailleurs, ces journées doctorales souhaitent replacer la pratique de l’entretien dans la boîte à outils des jeunes historiens. Nous encourageons donc les communications explorant l’ingénierie de l’histoire orale, les choix méthodologiques mis en œuvre et les difficultés éventuellement rencontrées. On pourra ainsi s’interroger sur le format et les méthodes d’entretien adoptées (entretien directif, semi-directif, récit de vie…) sur les multiples questions que soulèvent le choix du dispositif d’entretien (enregistrement vidéo, photographies, entretien collectif…) ainsi que sur les dimensions plus larges de l’enquête orale (modalités d’accès au terrain, relations enquêteur-enquêté…). Enfin, les défis de la transcription, de l’analyse et de la réinscription des entretiens au sein de la thèse forment des enjeux clefs souvent confinés aux coulisses de la recherche. Outre le versant méthodologique de ces questions, nous encourageons les communications abordant les enjeux épistémologiques, éthiques et juridiques de la collecte et de l’usage de témoignages. Du point de vue de l’exploitation des collections d’archives orales, les défis posés par le numérique et la démocratisation de l’accès aux témoignages, nous intéressent particulièrement.
Les journées d’études examineront enfin la question des formes de restitution aux interviewés et aux usages de l’histoire orale à destination d’une audience élargie. L’oral history anglo-saxonne, adossée à une public history dynamique, a ouvert la voie à de multiples usages des témoignages hors de la sphère universitaire, dont on trouve des échos en France : plateformes collaboratives, documentaires, pièces de théâtre, expositions… Dans le domaine de la muséographie en particulier, le dialogue entre histoire et histoire de l’art apparaît particulièrement fécond pour interroger la place nouvelle de l’oralité dans les dispositifs scénographiques. Plusieurs exemples récents témoignent de l’inventivité actuelle des dispositifs autour des entretiens (on pense notamment à l’exposition sonore « Voix cheminotes » organisée par Rails et histoire aux Archives nationales en 2015 ; ou encore à l’exposition « HER Story » de Julie Crenn et Pascal Lièvre qui s’est tenue à la Maison des Arts de Malakoff en 2017 puis à la galerie Le Cube de Rabat en 2018).
Les communications, d’une durée maximale de 20 minutes, seront discutées par des spécialistes des archives orales et praticiens de l’histoire orale.
Modalités de soumission
Les propositions de communication d’environ 3 500 signes incluront :
- Le titre et le résumé de la communication, précisant en particulier les entretiens ou les collections d’archives orales sur lesquelles elle s’appuie
- Une brève présentation de l’auteur
Les propositions ainsi que toute demande d’information sont à envoyer de manière conjointe à : arianemak.t@gmail.com et c.lemouneau@gmail.com
Lien vers l’appel :
http://crh.ehess.fr/index.php?6456
Calendrier
30 décembre 2018 – Date limite d’envoi des propositions
15 janvier 2019 – Réponse des organisatrices des journées
15 mars – Envoi de la communication écrite
11 et 12 avril – Journées d’étude