Cette rencontre scientifique se propose de croiser deux questions sur lesquelles beaucoup de chercheurs se penchent séparément : la question des genres textuels et celle du lexique, deuxchamps d’études dans lesquels se posent de nombreuses questions similaires, notamment autours de problématiquesde délimitations, d’unités, d’associations, de modes d’association, de découpages, de mise en œuvre, de mise en mémoire, de traitement,etc. et finalement aussi de production.
Ainsi, la généricité des textes est une dimension que la recherche ne cesse d’interroger. Des propos d’Aristote, qui, dans sa Poétique, traite de la manière dont il faut agencer les histoires pour en réussir la composition, à ceux de J.M. Adam qui proposede traiter laquestion en termes de dynamique, d’ effets de généricitéet de tensions génériques dans la mesure où, pour lui, un texte est toujours, à la production comme à la réception-interprétation, en relation à un ou plusieurs genres, on trouve un continuum d’études, de positions, de tentatives de cerner ce que, trop intuitivement peut-être, on ressent comme une possibilité de catégoriser les textes.
Le traitement générique des textes relèvepourtant bien d’une expertise qui est reconnue par la communauté comme quelque chose qu’il importe d’enseignerdans les institutions scolaires. Ainsila présence de la parole sous des formes et genres différents (conversation, discussion, chanson, lecture,etc.) est un moment essentiel de l’acquisition langagière des petits enfants et, dès les petites classes, on voit apparaître des distinctions, voire, selon certains chercheurs, des inégalités cognitives,entre ceux qui ont reçu et ceux qui n’ont pas reçu cette formation implicite initiale. Il y a donc bien là un apprentissage qui permet de développer une compétence.
Beaucoup de propositions ont permis d’avancer sur l’étude des genres textuels et de repérer ce qui fait effet de généricité, en allant des formats d’édition, du paratexte et du péritexte, aux éléments linguistiques de type marqueurs typologiques (il était une fois, amen) en passant par la mise au jour de caractéristiques lexico-grammaticales (sujets rhématiques, diathèse passive, adjectifs composés, etc.), qui prennent en compte des données quantitatives mais aussi de co-occurrences, en lien avec des conditions pragmatiques de production, ainsi quepar des études à visée énonciative qui mettent en relation la situation d’énonciation, de co-énonciation et le genre de texte.
On a pu montrer ainsi le lien entre protocole co-énonciatif et formes syntaxiques, par exemple, dans la recette de cuisine, dans les indications scéniques, les panneaux routiers, dans la description qui diffère selon qu’elle est narrative, articulée à partir d’une subjectivité, et/ou informative, focalisée sur l’objet perçu, montrant ainsi que les typologies textuelles ne peuvent faire l’économie d’analyses énonciatives.
Le deuxième axe d’étude, celle du lexique,s’inscrit dans la problématique à au moins deux titres.
Tout d’abord, la question se pose de la contribution du lexique à la constitution de la texture générique dans le sens de la cohésion, telle que Halliday et Hasan (Cohesion in English, 1976) l’ont envisagée, mais également dans le sens d’une possibilité d’identification du genre textuel par le biais de procédés et motifs lexicaux spécifiques. On se demandera par exemple s’il y a un lien entre une délimitation générique des textes et certains procédés de création lexicale (néologisme et pulsion ludique en lien avec les procédés d’amalgame, de troncation, de siglaison, de composition, de dérivation) ou encorecertains modesde signifiance des lexèmes, du sens dit littéral au sens dit figuré, ressort de la métaphore et la métonymie, du symbole et de l’euphémisme par exemple.
Ainsi, on pourra également se demander en quoi la construction générique informe la représentation que l’on se donne du lexique dont l’étude est maintenant largement étendueau domaine de la phraséologie et àla mise au jour de liens plus ou moinsfigés entre des unités lexicales : co-occurrence, collocation, colligation, pattern, schéma, formule, motif, routine, etc., dont l’essor de la linguistique de corpus a permis de valider le postulat déjà bien ancien. Y-a-t-il un lien entre certains genres et certains motifs lexicaux ? Les liens de type collocationnel entre des items lexicaux sont-ils validés en langue ou spécifiques à certains genres, trouve-t-on les mêmes associations en langue littéraire et en langue académique, par exemple ? À l’inverse, le défigement est-il la marque de genres en particulier ?
La question du lexique peut également être abordée par le biais des genres à l’oral soit dans la comparaison avec l’écrit (par exemple, la conférence vs l’article académique, le commentaire sportif vs l’article sportif, le conte oral vs écrit, etc.) soit dans la prise en compte des marqueurs prosodiques associés au lexique à l’oral (l’intonation, l’accentuation et lerythme influençantl’interprétation des unités lexicales nousrenvoient à la spécificité des genres : discours politiques, journaux télévisés, débats électoraux jouent-ils sur les mêmes marqueurs prosodiques ?).
On pourra se demander enfin quel est le statut cognitif de ces représentations : en quoi la mise au jour d’une relation particulière entre ces domaines permet-elle d’éclairer des phénomènes d’acquisition-apprentissage des langues (en L1 ou en L2) ?
Toutes ces questions et les réponses qui y seront apportées permettront ainsi d’informer l’étude de la généricité des textes, quel que soit le domaine d’étude, littéraire, scientifique, juridique en lien avec la représentation du lexique et vice versa.
Deux journées ont déjà été consacrées à ces questionnements pendant lesquelles les présentations étaient orientées autour d’un axe littéraire (Pau, mars 2018) puisd’un axe journalistique (Poitiers, octobre 2018). Pour ce nouveau volet du projet, les contributions sont les bienvenues sans aucune restriction de genres textuels, dans les discours écrits et oraux.
Atelier « Genres Brefs dans l’espace public » :
La journée du 12 octobre sera consacrée plus spécifiquement aux genres brefs dans le cadre des activités du Réseau « Genres brefsdans l’espace public » (coordinatrices I. Behr (Paris 3), F. Lefeuvre (Paris 3), C. Copy (UPPA) et F. Dhorne (Université Aoyama Gakuin, Tokyo)). Au cours de cette journée, les recherches déjà engagées sur la validité du critère de brièveté comme critère de généricité serontmises en perspective au regard des phénomènes lexicaux abordés plus haut.
Langues de travail : toutes.
Langues de communication : français et anglais.
Calendrier :
Dates du colloque : 10, 11, 12 octobre 2019, à l’Université de Pau et des Pays de l’Adour (campus de Bayonne)
Les propositions de communication d’une page et demi maximum (bibliographie incluse) devront être envoyées pour le 15 octobre 2018 aux quatre membres du comité d’organisation.
Réponse : 30 octobre 2018
Une publication regroupant une sélection des contributions est prévue pour 2020.
Laboratoires organisateurs : EA 7504 ALTER-UPPA, UMR 5478 IKER-UPPA-Bordeaux Montaigne, FoReLLiS EA 3816-Université de Poitiers.
Laboratoires associés au projet : EA4223 CEREG-Paris 3, EA 7345 CLESTHIA-Paris 3,
Comité d’organisation : Sandrine Bédouret, Jon Casenave, Christine Copy, Raluca Nita.
jean.casenave@u-bordeaux-montaigne.fr
Comité scientifique :
Jean-Michel Adam Université de Lausanne
Isabelle Chol Université de Pau& Pays de l’Adour
Hortènsia Curell Universitat Autònoma de Barcelona
Amanda Edmonds Université Montpellier 3
Lucie Gournay Université Paris-Est-Créteil
Emilie Guyard Université de Pau & Pays de l’Adour
Sylvie Hanote Université de Poitiers
Ramon Marti-Solano Université de Poitiers
Bérengère Moricheau-Airaud Université de Pau & Pays de l’Adour
Iva Novakova Université Grenoble Alpes
Argia Olçomendy Université de Pau et des Pays de l’Adour
Freiderikos Valetopoulos Université de Poitiers
Jeanne Vigneron-Bosbach Université de Caen
Tuija Virtanen Åbo Akademi University
Sarah de Vogüé Université de Paris Nanterre