12 au 14 janvier 2017, Fondation Deutsch de la Meurthe, Cité Internationale Universitaire de Paris, Congrès 2017 de la Société Française Shakespeare : Shakespeare et la Peur

Shakespeare et la Peur

Appel à contributions pour le Congrès 2017 de la Société Française Shakespeare

12 au 14 janvier 2017

Fondation Deutsch de la Meurthe, Cité Internationale Universitaire de Paris

Texte de cadrage

En ces temps de violences économiques, d’angoisses écologiques, de migrations forcées, de guerres et de terrorismes, il apparaît pertinent d’examiner les manières dont les scènes élisabéthaine et jacobéenne ont thématisé et utilisé la peur, et de réfléchir aux résonances qu’elles continuent de susciter aujourd’hui. On citera à cet égard le livre de Robert Appelbaum, qui n’hésite pas à nommer « terrorisme » la violence qui a secoué la société anglaise de la première modernité, du massacre de la Saint-Barthélemy aux complots et aux révoltes populaires (1). Le rapport entre Shakespeare et la peur passe notamment par les réappropriations des pièces dans le contexte des crises que nous traversons aujourd’hui. Comment se sert-on ou s’est-on appuyé sur Shakespeare pour conjurer la peur, ou pour déconstruire les mécanismes de la terreur, tant celle de la dictature (on pense à To be or not to be d’Ernst Lubitsch) que celle des attentats aveugles (voir par exemple les mises en scène récentes de Shakespeare en Syrie).

Il n’est sans doute aucune œuvre théâtrale de Shakespeare ou de ses contemporains qui ne mette en jeu la peur sous une forme ou sous une autre. De l’appréhension comique d’être cocu jusqu’à l’effroi de Macbeth à la vue du fantôme de Banquo, de l’inquiétude des artisans à l’idée que le « lion » puisse effrayer les dames du public à la crainte suscitée par la tyrannie de Richard III, on trouve tous les degrés de la peur chez Shakespeare, tout comme chez Marlowe, Middleton ou Webster. Que la tragédie cherche encore à susciter la terreur sacrée ou que la comédie tourne en dérision les modes de mise en scène de l’effroyable, que les pièces historiques analysent en détail les ressorts de la terreur politique telle qu’elle fut théorisée par Machiavel ou que les tragédies à grand spectacle capitalisent sur l’attirance croissante des spectateurs de la période jacobéenne pour les délices de l’épouvante, la thématique de la peur se décline à l’infini dans le théâtre shakespearien, reflétant des peurs intimes (« the dread of something after death » de Hamlet) autant que sociales (comme le spectre toujours présent de la peste ou de l’invasion étrangère). Shakespeare distingue entre « fear » (plus de 800 occurrences dans le canon) et « dread » (une cinquantaine d’occurrences) ou encore « fright », terme qu’on trouve souvent utilisé dans un contexte ironique, avec la suggestion latente que les événements concernés ne justifient pas vraiment la crainte qu’ils éveillent.

Au-delà des modalités spécifiques à la scène de la Renaissance anglaise, la peur peut se déplacer hors du monde de la fiction et du rapport entre scène et public. On s’intéressera dès lors à la peur de Shakespeare que peut susciter la canonisation de ses œuvres et l’institutionnalisation de son étude à l’école, ou encore celle qu’a pu provoquer au XVIIIe siècle son arrivée sur les scènes continentales chez un public plus habitué au théâtre classique : on pense à Voltaire mais aussi aux dramaturges romantiques qui ont voulu se hisser au niveau du « Barde » et le concurrencer sur son propre terrain. Et l’on ne saurait faire l’impasse sur toute la mouvance qui se regroupe encore aujourd’hui sous l’en-tête allitératif de « no fear Shakespeare ». La peur de Shakespeare peut aussi se transformer en peur pour Shakespeare, tant les remises en question de son identité ont pu fleurir à partir du XIXe siècle.

Nous espérons rassembler dans ce colloque historiens, spécialistes de littérature, de théâtre ou de « cultural studies », praticiens, mais aussi psychanalystes, sociologues et anthropologues.

Appel à contributions

Les contributions pourront porter sur (liste non exhaustive) :

  • Comment la peur est-elle théorisée à l’époque élisabéthaine et jacobéenne ?

  • Les différents degrés de la peur ;

  • Les symptômes de la peur sur scène (gestuelle, vocalité, masques, costumes, maquillage etc) ; phénoménologie de la peur ;

  • De quoi et de qui a-t-on peur sur la scène de Shakespeare et de ses contemporains ? (présages terrifiants, menaces, exécutions exemplaires, spectacles horribles et effroyables, mutilations et assassinats, fantômes effrayants, interventions surnaturelles, etc) ;

  • Comment et pourquoi susciter la peur chez les spectateur.rice.s ? (artifices de mise en scène, bruitages, fumées, apparitions, etc) ;

  • La peur de Shakespeare/ « No fear Shakespeare » ;

  • La peur pour Shakespeare ;

  • Les réappropriations de Shakespeare dans un contexte de guerre, de terreur ou de terrorisme ;

  • Comment se sert-on de Shakespeare pour conjurer la peur ?

Merci d’envoyer un abstract (maximum 500 mots) et une notice biographique (maximum 200 mots) avant le 25 mai 2016 à contact@societefrancaiseshakespeare.org.

Comité scientifique

  • Yan Brailowsky (Université Paris Ouest, Société Française Shakespeare)

  • Mark Burnett (Queen’s University, Belfast)

  • Jean-Michel Déprats (Université Paris Ouest Nanterre La Défense)

  • Pascale Drouet (Université de Poitiers)

  • Dominique Goy-Blanquet (Université de Picardie)

  • Sarah Hatchuel (Université du Havre, Société Française Shakespeare)

  • Pierre Kapitaniak (Université Paris VIII)

  • Harry Keyishian (Fairleigh Dickinson University)

  • Sophie Lemercier-Goddard (ENS Lyon)

  • Ronan Ludot-Vlasak (Université de Lille III)

  • Chantal Schütz (École Polytechnique, Société Française Shakespeare)

  • Nathalie Vienne-Guerrin (IRCL / Université Paul-Valéry – Montpellier III, Société Française Shakespeare).

ENGLISH

Shakespeare and Fear

Call for papers for the 2017 conference of the French Shakespeare Society
12-14 January 2017

Fondation Deutsch de la Meurthe, Cité Internationale Universitaire de Paris

Call for papers

In an era fraught with economic violence, environmental anxiety, forced migrations, war and terrorism, it seems particularly relevant to examine the ways in which the Elizabethan and Jacobean stage made use of fear and to consider how these fears continue to reverberate in the present. Such connections are clearly envisaged by Robert Appelbaum, who applies the word “terrorism” to the violence that shook Early Modern Europe, including the St. Bartholomew’s Day massacre and countless plots and popular uprisings (1). The re-appropriation of Shakespeare’s plays in the context of the crises we are experiencing is a case in point. How has Shakespeare been used to fend off fear, or deconstruct the workings of terror, dictatorship or armed intimidation — from Ernst Lubitsch’s To be or not to be to Shakespeare productions recently performed in Syria?

Fear is present in one form or another in almost all of the dramatic works of Shakespeare and his contemporaries. From the ridiculous apprehension of being made a cuckold to the dread felt by Macbeth when confronted to Banquo’s ghost, from the mechanicals’ worry that the “lion” might frighten the ladies to the terror on which Richard III’s tyranny relies, all degrees of fear are to be found in Shakespeare, as well as in Marlowe, Middleton or Webster. Be it in tragedies attempting to instil sacred terror or in comedies making fun of the staging of terrifying events, in historical plays critiquing the Machiavellian uses of political terror or in the new-fangled Jacobean taste for spectacular stage shows, fear is pervasive on the Shakespearean stage, reflecting individual emotions such as  “the dread of something after death” mentioned by Hamlet, as much as the ever-present social apprehension of the plague or foreign invasions. Shakespeare, for one, distinguishes fear (which occurs over 800 occurrences in the canon) from dread (50 occurrences) or fright, which is often to be found in ironic contexts, with an underlying suggestion that the events in question are not really worth the fretting they cause.

The notion of fear in connection with Shakespeare goes well beyond the modalities specific to the Early Modern English stage: the fact that the Bard’s works have been canonised and become compulsory reading at school and university has generated a fear of Shakespeare, while the arrival of his plays on the continental stages in the 18th century spawned trepidation among audiences and authors alike: there is certainly a form of fear in Voltaire’s loathing of, as much as in the Romantic playwrights’ desire to emulate, the master. This lasting dread is epitomized today under the alliterative heading of “no fear Shakespeare” and in the various attempts to domesticate the intricacies of Elizabethan writing with the help of reading companions, modernized editions, etc. The fear of Shakespeare can also become a fear for Shakespeare, in view of the endless probes and conspiracy plots around his identity that has arisen since the end of the 19th century.

We look forward to bringing together historians, literary scholars and theatre practitioners, as well as specialists in drama, cultural studies, psychoanalysis, sociology and anthropology to offer contributions on topics including (but not limited to):

  • Theories of/about fear in Early Modern England;

  • The different degrees of fear in Early Modern England;

  • Symptoms of fear on the Early Modern stage (body language, vocal language, masks, costumes, makeup, etc.) / a phenomenology of fear;

  • What and who is feared on the Shakespearean stage? (terrifying portents, threats, exemplary sentences, horrible and horrifying shows, mutilations and murders, ghosts, supernatural interventions, etc);

  • How and why is fear elicited in audience members? (staging tricks, noises, smoke, visions, etc.);

  • The fear of Shakespeare / “No fear Shakespeare”;

  • Fear for Shakespeare;

  • Updating Shakespeare in the context of war, terror or terrorism;

  • Invoking Shakespeare to allay fear.

Please send an abstract (maximum 500 words) and a short biography (maximum 200 words) by 25 may 2016 to contact@societefrancaiseshakespeare.org.

Scientific committee

  • Yan Brailowsky (Université Paris Ouest, Société Française Shakespeare)

  • Mark Burnett (Queen’s University, Belfast)

  • Jean-Michel Déprats (Université Paris Ouest Nanterre La Défense)

  • Pascale Drouet (Université de Poitiers)

  • Dominique Goy-Blanquet (Université de Picardie)

  • Sarah Hatchuel (Université du Havre, Société Française Shakespeare)

  • Pierre Kapitaniak (Université Paris VIII)

  • Harry Keyishian (Fairleigh Dickinson University)

  • Sophie Lemercier-Goddard (ENS Lyon)

  • Ronan Ludot-Vlasak (Université de Lille III)

  • Chantal Schütz (École Polytechnique, Société Française Shakespeare)

  • Nathalie Vienne-Guerrin (IRCL / Université Paul-Valéry – Montpellier III, Société Française Shakespeare).

 

(1) Terrorism Before the Letter, Mythography and Political Violence in England, Scotland, and France 1559-1642, OUP, 2015.


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